Ödön von Horváth
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Re: Ödön von Horváth
Meurtre dans la rue des Maures
Considérée comme la première pièce de von Horváth, Meurtre dans la rue des Maures ne sera publiée qu'en 1970 et jouée pour la première fois en 1980. C'est une pièce courte, (en trois actes) et donc en principe associée à une autre oeuvre lors de représentations.
Au premier acte, nous sommes chez les Klamuschke. La mère s'entend mal avec sa belle fille, la jeune fille, Ilse est courtisée par un étudiant, Müller, avec qui elle doit sortir ce soir. La venue du fils prodigue, Wenzel, alourdit encore l'atmosphère : Paul, son frère a peur qu'il ne soit venu encore une fois, pour extorquer de l'argent à leur mère. Mais Wenzel ne demande pas d'argent et semble quelque peu étrange.
Au deuxième acte, nous suivons Wenzel dans la rue. Il rôde devant une bijouterie, au rideau fermé. Des prostituées et agents de police vont et viennent, le rideau baissé, finit par attirer l'attention. le bijoutier a été assassiné, Wenzel est le coupable, mais il réussit à s'échapper.
Au troisième acte, la police vient au domicile des Klamuschke chercher Wenzel, mais ne trouve que son cadavre : il s'est pendu. Les membres de la famille se défont encore plus.
Un univers habité par la médiocrité et la mesquinerie de la petite bourgeoisie, entre égoïsme et sentiment de culpabilité dans une société de contrôle de l'individu, aussi bien par la famille, que par les institutions (la police). Tout cela dans une atmosphère crépusculaire, en noir et blanc, comme dans un vieux film.
Sans doute pas encore complètement maîtrisé, mais prometteur.
Considérée comme la première pièce de von Horváth, Meurtre dans la rue des Maures ne sera publiée qu'en 1970 et jouée pour la première fois en 1980. C'est une pièce courte, (en trois actes) et donc en principe associée à une autre oeuvre lors de représentations.
Au premier acte, nous sommes chez les Klamuschke. La mère s'entend mal avec sa belle fille, la jeune fille, Ilse est courtisée par un étudiant, Müller, avec qui elle doit sortir ce soir. La venue du fils prodigue, Wenzel, alourdit encore l'atmosphère : Paul, son frère a peur qu'il ne soit venu encore une fois, pour extorquer de l'argent à leur mère. Mais Wenzel ne demande pas d'argent et semble quelque peu étrange.
Au deuxième acte, nous suivons Wenzel dans la rue. Il rôde devant une bijouterie, au rideau fermé. Des prostituées et agents de police vont et viennent, le rideau baissé, finit par attirer l'attention. le bijoutier a été assassiné, Wenzel est le coupable, mais il réussit à s'échapper.
Au troisième acte, la police vient au domicile des Klamuschke chercher Wenzel, mais ne trouve que son cadavre : il s'est pendu. Les membres de la famille se défont encore plus.
Un univers habité par la médiocrité et la mesquinerie de la petite bourgeoisie, entre égoïsme et sentiment de culpabilité dans une société de contrôle de l'individu, aussi bien par la famille, que par les institutions (la police). Tout cela dans une atmosphère crépusculaire, en noir et blanc, comme dans un vieux film.
Sans doute pas encore complètement maîtrisé, mais prometteur.
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Je ne lis jamais un livre dont je dois écrire la critique ; on se laisse tellement influencer. (Oscar Wilde)
Arabella- Messages : 4641
Date d'inscription : 29/11/2016
Re: Ödön von Horváth
Belvédère
La pièce a été écrite pour une création prévue à Dresde en 1929. Elle a été finalement éditée en 1970 et jouée pour la première fois en 1969 à Graz. le village d'Europe centrale dans lequel Ödön von Horváth situe l'action a été inspiré par Murnau en Haute-Bavière, que connaissait très bien l'auteur. Certains personnages de la pièce peuvent même être identifiés, comme le garçon Max, qui aurait eu pour modèle un serveur impertinent, qui avait l'habitude d'effectuer son service sans chaussures.
Le premier acte expose la situation. Strasser, le propriétaire de l'hôtel du Belvédère est au bord de la faillite. Il a une seule cliente, Ada, baronne von Stetten. La vieille femme appâte tous les hommes présents par sa fortune, en a fait ses amants, et les manipule avec cruauté. En plus de Strasser, il y a Max le garçon, et Karl, le chauffeur. Ils sont tous les deux un passé trouble. Arrive Müller, un représentant, qui réclame de l'argent à Strasser, qui ne peut le payer, puis Emmanuel, le frère d'Ada, qui a besoin d'argent ; sa soeur joue avec lui, ne lui disant ni oui ni non. L'acte se termine par l'arrivée de Christine, une jeune femme pauvre, avec qui Strasser a eu une liaison.
Au deuxième acte, l'action se resserre autour de Christine. Ada veut que Strasser la mette à la porte, Emmanuelle suggère que les hommes présents fassent semblant de reconnaître en elle une ancienne maîtresse, ce qui permettra à Strasser s'en débarrasse sous prétexte de mauvais conduite. Les hommes s'en donnent à coeur joie sous le regard goguenard d'Ada. Mais la scène a une fin inattendue : Christine a hérité une jolie somme et elle était venue dans le but de remettre à flot l'hôtel de Strasser. Après le traitement qu'elle a subi, elle veut prendre le premier train le lendemain matin pour repartir.
Au troisième acte, les hommes tentent tous de convaincre Christine de prendre le train en question en leur compagnie. Ada est délaissée et humiliée à son tour. En tentant de séduire la jeune femme, chacun des protagonistes se révèle tel qu'il est. Elle décide de partir toute seule et d'élever l'enfant qu'elle a eu de Strasser.
Plus qu'une comédie de moeurs, c'est une farce cruelle. Elle met en évidence les différentes façons dont les hommes utilisent et instrumentalisent les femmes. Strasser le charmeur, au fond totalement impitoyable sous des allures avenantes, Karl qui veut s'imposer par la force, Müller qui veut les réduire à des épouses soumises et conventionnelles sans aucune liberté, Emmanuel qui veut les attirer par un titre une position sociale, des manières policées et en échanger les dépouiller… C'est à chaque fois un jeu de dupes. C'est aussi un tableau pitoyable d'une société en décomposition : le noble ruiné, décadent, prêt à tout pour conserver sa manière de vivre, l'individu dangereux et prêt à basculer dans la violence pour obtenir ce qu'il désire, et tous les autres, capables de tous les mensonges et de toutes les compromissions pour un gain plus ou moins dérisoire, prêts à s'avilir devant n'importe qui possédant un peu d'argent, la seule valeur qui a cours. Au final, l'opportunisme et l'absence de toute éthique, ne va amener tous ces personnages qu'à une impasse, à un échec sans recours.
Excellente pièce.
La pièce a été écrite pour une création prévue à Dresde en 1929. Elle a été finalement éditée en 1970 et jouée pour la première fois en 1969 à Graz. le village d'Europe centrale dans lequel Ödön von Horváth situe l'action a été inspiré par Murnau en Haute-Bavière, que connaissait très bien l'auteur. Certains personnages de la pièce peuvent même être identifiés, comme le garçon Max, qui aurait eu pour modèle un serveur impertinent, qui avait l'habitude d'effectuer son service sans chaussures.
Le premier acte expose la situation. Strasser, le propriétaire de l'hôtel du Belvédère est au bord de la faillite. Il a une seule cliente, Ada, baronne von Stetten. La vieille femme appâte tous les hommes présents par sa fortune, en a fait ses amants, et les manipule avec cruauté. En plus de Strasser, il y a Max le garçon, et Karl, le chauffeur. Ils sont tous les deux un passé trouble. Arrive Müller, un représentant, qui réclame de l'argent à Strasser, qui ne peut le payer, puis Emmanuel, le frère d'Ada, qui a besoin d'argent ; sa soeur joue avec lui, ne lui disant ni oui ni non. L'acte se termine par l'arrivée de Christine, une jeune femme pauvre, avec qui Strasser a eu une liaison.
Au deuxième acte, l'action se resserre autour de Christine. Ada veut que Strasser la mette à la porte, Emmanuelle suggère que les hommes présents fassent semblant de reconnaître en elle une ancienne maîtresse, ce qui permettra à Strasser s'en débarrasse sous prétexte de mauvais conduite. Les hommes s'en donnent à coeur joie sous le regard goguenard d'Ada. Mais la scène a une fin inattendue : Christine a hérité une jolie somme et elle était venue dans le but de remettre à flot l'hôtel de Strasser. Après le traitement qu'elle a subi, elle veut prendre le premier train le lendemain matin pour repartir.
Au troisième acte, les hommes tentent tous de convaincre Christine de prendre le train en question en leur compagnie. Ada est délaissée et humiliée à son tour. En tentant de séduire la jeune femme, chacun des protagonistes se révèle tel qu'il est. Elle décide de partir toute seule et d'élever l'enfant qu'elle a eu de Strasser.
Plus qu'une comédie de moeurs, c'est une farce cruelle. Elle met en évidence les différentes façons dont les hommes utilisent et instrumentalisent les femmes. Strasser le charmeur, au fond totalement impitoyable sous des allures avenantes, Karl qui veut s'imposer par la force, Müller qui veut les réduire à des épouses soumises et conventionnelles sans aucune liberté, Emmanuel qui veut les attirer par un titre une position sociale, des manières policées et en échanger les dépouiller… C'est à chaque fois un jeu de dupes. C'est aussi un tableau pitoyable d'une société en décomposition : le noble ruiné, décadent, prêt à tout pour conserver sa manière de vivre, l'individu dangereux et prêt à basculer dans la violence pour obtenir ce qu'il désire, et tous les autres, capables de tous les mensonges et de toutes les compromissions pour un gain plus ou moins dérisoire, prêts à s'avilir devant n'importe qui possédant un peu d'argent, la seule valeur qui a cours. Au final, l'opportunisme et l'absence de toute éthique, ne va amener tous ces personnages qu'à une impasse, à un échec sans recours.
Excellente pièce.
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Je ne lis jamais un livre dont je dois écrire la critique ; on se laisse tellement influencer. (Oscar Wilde)
Arabella- Messages : 4641
Date d'inscription : 29/11/2016
Re: Ödön von Horváth
L'institutrice
Il s'agit en réalité d'une esquisse de pièce, l'oeuvre n'a jamais été achevée. Elle a été publiée pour la première fois en 1970. Ödön von Horváth s'est sans doute inspiré d'un cas réel, celui d'une institutrice Elly Maldaque. Il a pu avoir connaissance de sa situation alors qu'il travaillait pour la Ligue allemande des droits de l'homme en 1926-1927 à Berlin.
Nous avons donc quelques scènes, dont certaines ont deux versions. Dans un premier temps, nous faisons connaissance avec Ella et son amie Eva tout juste sortie de prison. Ella a rejeté son éducation chrétienne ; son soutien à Eva lui vaut une perquisition, une phrase dans son journal intime qui laisse penser à une sympathie communiste, provoque son licenciement de l'enseignement. Elle tente de faire valoir ses droits, soutenu dans un premier temps par un journaliste. Mais très vite des menaces se précisent sur ceux qui l'aident, ses démarches se heurtent soit à une indifférence dissuasive, soit à une violence feutrée. Elle finit par perdre son calme et à être internée comme dangereuse.
Ce n'est qu'une ébauche, mais c'est d'une grande force. Ödön von Horváth met à nu un système de violence institutionnelle d'état, la façon dont elle fait plier les individus pour en devenir des rouages, et élimine ceux qui ne veulent ou ne peuvent rentrer dans le rang. Certaines répliques font froid dans le dos, en particulier par leur actualité. Puissant.
Il s'agit en réalité d'une esquisse de pièce, l'oeuvre n'a jamais été achevée. Elle a été publiée pour la première fois en 1970. Ödön von Horváth s'est sans doute inspiré d'un cas réel, celui d'une institutrice Elly Maldaque. Il a pu avoir connaissance de sa situation alors qu'il travaillait pour la Ligue allemande des droits de l'homme en 1926-1927 à Berlin.
Nous avons donc quelques scènes, dont certaines ont deux versions. Dans un premier temps, nous faisons connaissance avec Ella et son amie Eva tout juste sortie de prison. Ella a rejeté son éducation chrétienne ; son soutien à Eva lui vaut une perquisition, une phrase dans son journal intime qui laisse penser à une sympathie communiste, provoque son licenciement de l'enseignement. Elle tente de faire valoir ses droits, soutenu dans un premier temps par un journaliste. Mais très vite des menaces se précisent sur ceux qui l'aident, ses démarches se heurtent soit à une indifférence dissuasive, soit à une violence feutrée. Elle finit par perdre son calme et à être internée comme dangereuse.
Ce n'est qu'une ébauche, mais c'est d'une grande force. Ödön von Horváth met à nu un système de violence institutionnelle d'état, la façon dont elle fait plier les individus pour en devenir des rouages, et élimine ceux qui ne veulent ou ne peuvent rentrer dans le rang. Certaines répliques font froid dans le dos, en particulier par leur actualité. Puissant.
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Arabella- Messages : 4641
Date d'inscription : 29/11/2016
Re: Ödön von Horváth
Figaro divorce
La date de l'écriture de la pièce varie suivant les sources entre1935 et 1937), en tous les cas à un moment où l'auteur a fui l'Allemagne, à cause de la montée du nazisme. Figaro divorce est crée à Prague en 1937.
Ödön von Horváth reprend dans son oeuvre un certain nombres de personnages de la pièce De Beaumarchais, le mariage de Figaro. Les deux titres se répondent : au mariage du premier s'oppose le divorce du second. Nous sommes donc quelques années après, la Révolution gronde, et le comte et la comtesse Almaviva fuient leur pays pour se réfugier en Allemagne. Suzanne et Figaro, mariés, les accompagnent. Suzanne par attachement, Figaro pour suivre sa femme. La situation matérielle du comte et de sa femme se dégrade rapidement. Figaro décide de les quitter et de reprendre une boutique de coiffeur dans une petite ville. Sa femme l'accompagne, même si elle est pleine de doutes. Les relations se dégradent rapidement entre les époux, et l'accueil dans la petite ville est loin d'être chaleureux pour ces immigrés. Suzanne rejoint le comte (la comtesse est morte entre temps) et travaille dans un bar tenu par Chérubin. Figaro décide de revenir dans son pays, dans lequel la révolution passe à une nouvelle étape, dans laquelles « les repentis » peuvent retrouver une place. Figare devient ainsi l'intendant du château du comte, devenu entre temps un orphelinat pour les pupilles de la nation. le comte et Suzanne finissent eux aussi par revenir, mais la réconciliation semble impossible.
Il est très difficile de résumer cette pièce, composée de courtes scènes, d'une grand intensité, qui suggèrent à travers une situation, énormément de choses à chaque fois. Même s'il situe sa pièce au XVIIIe siècle, von Horváth s'inspire à l'évidence de la montée du nazisme en Allemagne, mais, et c'est sans doute la très grand richesse de ce théâtre, il crée une situation prototypique, qui pourrait s'appliquer à énormément de lieux et de temps différents. Ce qu'il met en évidence, ce sont des mécanismes, au-delà d'événements précis et anecdotiques. le discours de Figaro à sa prise de fonction dans l'orphelinat, est un exemple de manipulation de foules, inquiétant et d'une efficacité redoutable, qui pourrait être mis dans la bouche de n'importe quel dictateur de n'importe quel temps. Il y a aussi une analyse de l'exil, de ce qu'il suppose, chez les exilés, mais aussi chez les gens qui les accueillent, le moins que l'on puisse dire, pas forcément de bon coeur. La peinture de la petite ville allemande est effrayante, et aussi la façon dont Figaro refuse de le voir, essayant à tout prix de « s'intégrer » au risque d'y perdre son âme. Aux passages qui semblent réalistes, se superpose une dimension conte, présent en particulier chez certains personnages, comme le garde chasse et la sage femme, les scènes dans le forêt également, mais un vrai conte à l'ancienne, effrayant, qui remue les peurs ancestrales, qui évoque la mort.
Nous sommes très loin d'un Figaro plein de vitalité et de ressources, il y a quelque chose de mortifère et de malsain dans le personnage, et c'est pourquoi Suzanne qui ne le reconnaît plus, décide de le quitter. Les femmes semblent garder chez von Horváth davantage de lucidité et de bienveillance, d'humanité pourrait-on dire, tout en subissant un sort encore plus lourd que les hommes.
C'est terriblement pessimiste, très juste et dense. Une immense pièce.
La date de l'écriture de la pièce varie suivant les sources entre1935 et 1937), en tous les cas à un moment où l'auteur a fui l'Allemagne, à cause de la montée du nazisme. Figaro divorce est crée à Prague en 1937.
Ödön von Horváth reprend dans son oeuvre un certain nombres de personnages de la pièce De Beaumarchais, le mariage de Figaro. Les deux titres se répondent : au mariage du premier s'oppose le divorce du second. Nous sommes donc quelques années après, la Révolution gronde, et le comte et la comtesse Almaviva fuient leur pays pour se réfugier en Allemagne. Suzanne et Figaro, mariés, les accompagnent. Suzanne par attachement, Figaro pour suivre sa femme. La situation matérielle du comte et de sa femme se dégrade rapidement. Figaro décide de les quitter et de reprendre une boutique de coiffeur dans une petite ville. Sa femme l'accompagne, même si elle est pleine de doutes. Les relations se dégradent rapidement entre les époux, et l'accueil dans la petite ville est loin d'être chaleureux pour ces immigrés. Suzanne rejoint le comte (la comtesse est morte entre temps) et travaille dans un bar tenu par Chérubin. Figaro décide de revenir dans son pays, dans lequel la révolution passe à une nouvelle étape, dans laquelles « les repentis » peuvent retrouver une place. Figare devient ainsi l'intendant du château du comte, devenu entre temps un orphelinat pour les pupilles de la nation. le comte et Suzanne finissent eux aussi par revenir, mais la réconciliation semble impossible.
Il est très difficile de résumer cette pièce, composée de courtes scènes, d'une grand intensité, qui suggèrent à travers une situation, énormément de choses à chaque fois. Même s'il situe sa pièce au XVIIIe siècle, von Horváth s'inspire à l'évidence de la montée du nazisme en Allemagne, mais, et c'est sans doute la très grand richesse de ce théâtre, il crée une situation prototypique, qui pourrait s'appliquer à énormément de lieux et de temps différents. Ce qu'il met en évidence, ce sont des mécanismes, au-delà d'événements précis et anecdotiques. le discours de Figaro à sa prise de fonction dans l'orphelinat, est un exemple de manipulation de foules, inquiétant et d'une efficacité redoutable, qui pourrait être mis dans la bouche de n'importe quel dictateur de n'importe quel temps. Il y a aussi une analyse de l'exil, de ce qu'il suppose, chez les exilés, mais aussi chez les gens qui les accueillent, le moins que l'on puisse dire, pas forcément de bon coeur. La peinture de la petite ville allemande est effrayante, et aussi la façon dont Figaro refuse de le voir, essayant à tout prix de « s'intégrer » au risque d'y perdre son âme. Aux passages qui semblent réalistes, se superpose une dimension conte, présent en particulier chez certains personnages, comme le garde chasse et la sage femme, les scènes dans le forêt également, mais un vrai conte à l'ancienne, effrayant, qui remue les peurs ancestrales, qui évoque la mort.
Nous sommes très loin d'un Figaro plein de vitalité et de ressources, il y a quelque chose de mortifère et de malsain dans le personnage, et c'est pourquoi Suzanne qui ne le reconnaît plus, décide de le quitter. Les femmes semblent garder chez von Horváth davantage de lucidité et de bienveillance, d'humanité pourrait-on dire, tout en subissant un sort encore plus lourd que les hommes.
C'est terriblement pessimiste, très juste et dense. Une immense pièce.
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