Josef Skvorecký
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Re: Josef Skvorecký
Miracle en Bohême
C'est le troisième roman de Josef Škvorecký dans lequel apparaît Daniel Smiricky, qui ressemble par bien des aspects à l'auteur lui-même. Ce roman a une construction plus complexe que les deux premiers , Les Lâches et L'escadron blindé, les événements relatés se passent à des moments différents, certains ont lieu au début des années cinquante, et d'autres autour de 68. Il y a des allées et venues dans le temps, et cela demande parfois de l'attention de savoir où l'on est et à quel moment.
En ce qui concerne Danny, dans la partie la moins récente il est tout frais émoulu de l'université et attend d'effectuer son service militaire. Il a été envoyé comme enseignant dans une école de fille dans une petite ville. Et là il assiste au cours d'une messe à un « miracle » une statue de saint Joseph qui bouge. Une quinzaine d'année plus tard, au moment du dégel, une des relations de Danny enquête sur ce supposé miracle et sur les événements en rapport, comme l'enlèvement et l'assassinat du prêtre, toute les machinations de la police secrète autour de l'événement.
Dans les résumés du livre que j'ai pu lire, les commentateurs insistent sur l'aspect « bilan » du printemps de Prague. Une partie importante de l'histoire se déroule pendant ou à proximité de cet événement, mais le mot de bilan me paraît inapproprié ; car il suppose une sorte d'approche systématique et structurée, alors que nous sommes en présence d'un kaléidoscope, d'une succession d'images, d'impressions ; et réducteur car le roman aborde bien d'autres thèmes et aspects qu'uniquement le printemps de Prague. C'est une sorte de vision ironique et désabusée de l'homme, avec la tentation d'adhérer à un discours de certitudes, que ce soit religieux ou politique, qui dédouane finalement de toute remise en question. le catholicisme, le communisme ou la critique de ce dernier, aboutissent à des schémas de pensée systématiques, dans lequel la cohérence interne du propos tient lieu de vérité, au risque d'écraser les personnes. L'essentiel de la charge est dirigé en direction du discours communiste, la mise en relation avec le discours et la réalité est la plus féroce, mais à aucun moment l'auteur ne nous laisse oublier que ce discours là est l'un parmi d'autres, et que justifier des horreurs par un raisonnement logique apparemment irréfutable est une grand spécialité humaine, existante à toute époque.
Malgré toute la noirceur de cette vision du monde, le livre est loin d'être sinistre, car l'auteur choisit l'humour et le rire pour affronter le monde qui l'entoure. Un humour par moment très noir et un rire qui peut être un tant soit peu désespéré, mais quand même l'humour et le rire sont les meilleures armes. Et ce qui est le plus visible au premier coup d'oeil ce sont les aspects légers et satiriques, la noirceur ne vient vraiment pleinement que dans un deuxième temps, comme un dépôt.
Ambitieux, aussi bien dans la construction que dans la vision du monde et de l'homme, Miracle en Bohême n'est pas à mon sens complètement abouti. Je trouve en particulier que l'auteur n'a pas complètement maîtrisé la construction complexe de son livre. Certains éléments ne m'ont pas parus vraiment pertinents (comme l'histoire de la partie d'échecs à distance truquée), d'autres pas complètement exploités ou un peu confus au final.
C'est le troisième roman de Josef Škvorecký dans lequel apparaît Daniel Smiricky, qui ressemble par bien des aspects à l'auteur lui-même. Ce roman a une construction plus complexe que les deux premiers , Les Lâches et L'escadron blindé, les événements relatés se passent à des moments différents, certains ont lieu au début des années cinquante, et d'autres autour de 68. Il y a des allées et venues dans le temps, et cela demande parfois de l'attention de savoir où l'on est et à quel moment.
En ce qui concerne Danny, dans la partie la moins récente il est tout frais émoulu de l'université et attend d'effectuer son service militaire. Il a été envoyé comme enseignant dans une école de fille dans une petite ville. Et là il assiste au cours d'une messe à un « miracle » une statue de saint Joseph qui bouge. Une quinzaine d'année plus tard, au moment du dégel, une des relations de Danny enquête sur ce supposé miracle et sur les événements en rapport, comme l'enlèvement et l'assassinat du prêtre, toute les machinations de la police secrète autour de l'événement.
Dans les résumés du livre que j'ai pu lire, les commentateurs insistent sur l'aspect « bilan » du printemps de Prague. Une partie importante de l'histoire se déroule pendant ou à proximité de cet événement, mais le mot de bilan me paraît inapproprié ; car il suppose une sorte d'approche systématique et structurée, alors que nous sommes en présence d'un kaléidoscope, d'une succession d'images, d'impressions ; et réducteur car le roman aborde bien d'autres thèmes et aspects qu'uniquement le printemps de Prague. C'est une sorte de vision ironique et désabusée de l'homme, avec la tentation d'adhérer à un discours de certitudes, que ce soit religieux ou politique, qui dédouane finalement de toute remise en question. le catholicisme, le communisme ou la critique de ce dernier, aboutissent à des schémas de pensée systématiques, dans lequel la cohérence interne du propos tient lieu de vérité, au risque d'écraser les personnes. L'essentiel de la charge est dirigé en direction du discours communiste, la mise en relation avec le discours et la réalité est la plus féroce, mais à aucun moment l'auteur ne nous laisse oublier que ce discours là est l'un parmi d'autres, et que justifier des horreurs par un raisonnement logique apparemment irréfutable est une grand spécialité humaine, existante à toute époque.
Malgré toute la noirceur de cette vision du monde, le livre est loin d'être sinistre, car l'auteur choisit l'humour et le rire pour affronter le monde qui l'entoure. Un humour par moment très noir et un rire qui peut être un tant soit peu désespéré, mais quand même l'humour et le rire sont les meilleures armes. Et ce qui est le plus visible au premier coup d'oeil ce sont les aspects légers et satiriques, la noirceur ne vient vraiment pleinement que dans un deuxième temps, comme un dépôt.
Ambitieux, aussi bien dans la construction que dans la vision du monde et de l'homme, Miracle en Bohême n'est pas à mon sens complètement abouti. Je trouve en particulier que l'auteur n'a pas complètement maîtrisé la construction complexe de son livre. Certains éléments ne m'ont pas parus vraiment pertinents (comme l'histoire de la partie d'échecs à distance truquée), d'autres pas complètement exploités ou un peu confus au final.
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Je ne lis jamais un livre dont je dois écrire la critique ; on se laisse tellement influencer. (Oscar Wilde)
Arabella- Messages : 4799
Date d'inscription : 29/11/2016
Re: Josef Skvorecký
La légende d'Emöke
La légende d'Emöke, est un court roman (ou longue nouvelle) qui suit immédiatement Les lâches dans l'oeuvre de Josef Skvorecký. Néanmoins, le personnage du livre n'est pas Danny. Cela dit, le narrateur lui ressemble un peu. le livre se passe dans une villégiature, le narrateur partage la chambre d'un instituteur, et très vite tous les deux s'intéressent à Emöke, une jeune femme d'origine hongroise.
C'est le récit d'une rencontre qui aurait pu avoir lieu mais ne n'a pas eu lieu. Une nostalgie, un possible qui s'est enfuit. Une fois l'instant passé, il n'est pas possible de revenir en arrière. Cela s'achève par le retour à trois solitudes, les départ vers les petites vies qui auraient pu changer mais qui resteront ce qu'elles étaient. Avec juste le souvenir, le regret de ce qui auraient pu être. Une légende.
La légende d'Emöke, est un court roman (ou longue nouvelle) qui suit immédiatement Les lâches dans l'oeuvre de Josef Skvorecký. Néanmoins, le personnage du livre n'est pas Danny. Cela dit, le narrateur lui ressemble un peu. le livre se passe dans une villégiature, le narrateur partage la chambre d'un instituteur, et très vite tous les deux s'intéressent à Emöke, une jeune femme d'origine hongroise.
C'est le récit d'une rencontre qui aurait pu avoir lieu mais ne n'a pas eu lieu. Une nostalgie, un possible qui s'est enfuit. Une fois l'instant passé, il n'est pas possible de revenir en arrière. Cela s'achève par le retour à trois solitudes, les départ vers les petites vies qui auraient pu changer mais qui resteront ce qu'elles étaient. Avec juste le souvenir, le regret de ce qui auraient pu être. Une légende.
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Arabella- Messages : 4799
Date d'inscription : 29/11/2016
Re: Josef Skvorecký
-Une chouette saison-
Un titre à prendre bien sûr dans les deux sens. Dans son style toujours simple et distancié, Josef Skvorecky s'amuse une nouvelle fois ici de son héros Danny que l'on retrouve à Kostelec, l'année de ses 16 ans, alors que l'armée allemande a mis la Tchécoslovaquie sous protectorat. Pour lui et ses amis tout cela importe peu, ils ont la frivolité de la jeunesse et se protègent inconsciemment de l'Histoire déjà en marche. Il n'y a que peu d'allusions en rapport au régime nazi, il ne sert qu'en toile de fond et leurs aventures apparaissent encore plus décalées, les questions existentielles de ces jeunes se limitant uniquement aux filles et au jazz!
Danny lui les aime toutes, Irina, Marie, Alena et les autres. C'est un baratineur sincère, un dragueur de l'instant qui croit toujours tomber sur le grand amour. Pour les emballer il dispose d'un échantillon de recettes qu'il a plus ou moins chopées dans les films ou les romans, ou plus simplement dans une imagination débordante. Les belles ne sont bien sûr pas dupes et il se récolte pas mal de vestes mais ça ne le décourage pas. S 'ensuit une série de quiproquos et de situations toutes aussi rocambolesques dans lesquelles notre héros d'un jour se retrouve souvent marri. Mais qu'importe, il garde la foi!
Le ton est plus léger que Les lâches. On est dans cet état vaporeux de l'insouciance et du rêve. L'auteur cherche avant tout à préserver cette liberté qui leur est propre, et que le contexte historique, tout dramatique qu'il est, ne peut ternir. Il l'amplifie même d'une certaine façon tant le fossé est immense, en lui conférant ce charme singulier de fin d'époque, de dernière danse avant le cataclysme. Les bonheurs de Danny, aussi inconsistants soient ils, traduisent surtout ce refus (inavoué, inconscient) de tomber sous le joug de la barbarie. En soi c'était un acte subversif, et je peux comprendre qu'il ait été censuré car son ton ironique défie déjà l'autorité omniprésente de l'Occupant. Bien qu'il n'ait pas la force du précédent, encore un chouette roman plein d'humour de Skvorecky. J'ai retrouvé avec plaisir le charme et l'élégance de son écriture, ce ton si particulier teinté de dérision qui reste la seule barrière face à l'aveuglement d'un système et au désespoir qu'il sous-tend derrière. La fin nous ramène d'une phrase lapidaire à la réalité.
Un titre à prendre bien sûr dans les deux sens. Dans son style toujours simple et distancié, Josef Skvorecky s'amuse une nouvelle fois ici de son héros Danny que l'on retrouve à Kostelec, l'année de ses 16 ans, alors que l'armée allemande a mis la Tchécoslovaquie sous protectorat. Pour lui et ses amis tout cela importe peu, ils ont la frivolité de la jeunesse et se protègent inconsciemment de l'Histoire déjà en marche. Il n'y a que peu d'allusions en rapport au régime nazi, il ne sert qu'en toile de fond et leurs aventures apparaissent encore plus décalées, les questions existentielles de ces jeunes se limitant uniquement aux filles et au jazz!
Danny lui les aime toutes, Irina, Marie, Alena et les autres. C'est un baratineur sincère, un dragueur de l'instant qui croit toujours tomber sur le grand amour. Pour les emballer il dispose d'un échantillon de recettes qu'il a plus ou moins chopées dans les films ou les romans, ou plus simplement dans une imagination débordante. Les belles ne sont bien sûr pas dupes et il se récolte pas mal de vestes mais ça ne le décourage pas. S 'ensuit une série de quiproquos et de situations toutes aussi rocambolesques dans lesquelles notre héros d'un jour se retrouve souvent marri. Mais qu'importe, il garde la foi!
Le ton est plus léger que Les lâches. On est dans cet état vaporeux de l'insouciance et du rêve. L'auteur cherche avant tout à préserver cette liberté qui leur est propre, et que le contexte historique, tout dramatique qu'il est, ne peut ternir. Il l'amplifie même d'une certaine façon tant le fossé est immense, en lui conférant ce charme singulier de fin d'époque, de dernière danse avant le cataclysme. Les bonheurs de Danny, aussi inconsistants soient ils, traduisent surtout ce refus (inavoué, inconscient) de tomber sous le joug de la barbarie. En soi c'était un acte subversif, et je peux comprendre qu'il ait été censuré car son ton ironique défie déjà l'autorité omniprésente de l'Occupant. Bien qu'il n'ait pas la force du précédent, encore un chouette roman plein d'humour de Skvorecky. J'ai retrouvé avec plaisir le charme et l'élégance de son écriture, ce ton si particulier teinté de dérision qui reste la seule barrière face à l'aveuglement d'un système et au désespoir qu'il sous-tend derrière. La fin nous ramène d'une phrase lapidaire à la réalité.
Tout était fini... à cause de cette guerre tout était fini, ils commençaient à les fusiller...nos jeunes...les bourgeois..did you ever dream, lucky baby...j'appelais douloureusement, dans le vide, personne ne m'entendait...and wake up, cold, in the dark...
Aeriale- Messages : 11779
Date d'inscription : 30/11/2016
Re: Josef Skvorecký
Il est dans ma PAL, et ton commentaire me donne envie, Aeriale.
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Arabella- Messages : 4799
Date d'inscription : 29/11/2016
Re: Josef Skvorecký
Je pense que tu pourrais l'en faire sortir!
On retrouve Dany bien sûr, et s'il est plus léger que les autres et se concentre sur l'insouciance de leur jeunesse, on y perçoit tout de même cet équilibre bien fragile entre le rire et le drame tout prêt à éclater. Cela intensifie les sensation, je trouve.
Et si tu aimes son humour, n'hésite pas, Arabella!
On retrouve Dany bien sûr, et s'il est plus léger que les autres et se concentre sur l'insouciance de leur jeunesse, on y perçoit tout de même cet équilibre bien fragile entre le rire et le drame tout prêt à éclater. Cela intensifie les sensation, je trouve.
Et si tu aimes son humour, n'hésite pas, Arabella!
Aeriale- Messages : 11779
Date d'inscription : 30/11/2016
Re: Josef Skvorecký
Qui mène l'enquête ?
Il s'agit de quatre nouvelles policières, avec le lieutenant Boruvka comme personnage principal. C'est une sorte d'anti-héros de roman policier, d'âge mûr, corpulent, refusant de tirer sur les suspects en train de s'enfuir, à la maison écrasé par une épouse à la forte personnalité, il résout l'air de rien les enquêtes policières les plus complexes. Et surtout les plus tordues, à la limite du loufoque, comme cette vieille dame acariâtre qui meurt à cause d'une sorte de poignard dans l'oeil dans une pièce fermée à clé.
Enquêtes improbables, personnages bizarres, et notre lieutenant qui se débat avec sa libido à cause d'une auxiliaire de police au chignon érotique, ces récits sont des moments délectables, grâce à l'humour décalé et fin de l'auteur.
Il s'agit de quatre nouvelles policières, avec le lieutenant Boruvka comme personnage principal. C'est une sorte d'anti-héros de roman policier, d'âge mûr, corpulent, refusant de tirer sur les suspects en train de s'enfuir, à la maison écrasé par une épouse à la forte personnalité, il résout l'air de rien les enquêtes policières les plus complexes. Et surtout les plus tordues, à la limite du loufoque, comme cette vieille dame acariâtre qui meurt à cause d'une sorte de poignard dans l'oeil dans une pièce fermée à clé.
Enquêtes improbables, personnages bizarres, et notre lieutenant qui se débat avec sa libido à cause d'une auxiliaire de police au chignon érotique, ces récits sont des moments délectables, grâce à l'humour décalé et fin de l'auteur.
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Arabella- Messages : 4799
Date d'inscription : 29/11/2016
Re: Josef Skvorecký
L'escadron blindé
Le personnage principal de ce roman est de nouveau Danny, le narrateur du roman Les lâches. Nous sommes maintenant en 1953, Danny a fini ses études et il a du partir faire son service militaire. L'escadron blindé est une impitoyable mais surtout irrésistible satire de la vie et des moeurs militaires en pleine époque stalinienne dans l'armée tchèque. Presque toute l'armée, des officiers au simple soldat de rang ne rêve que d'échapper à ses devoirs militaires de toutes les façons possibles et imaginables. Les exercices militaires tournent à la farce, et les séances embrigadement idéologique au grand guignol, les hommes opposant une sorte de force d'inertie subversive à toutes les tentatives de les faire marcher au pas. Une sorte de satire entre le soldat Chveik et les Marx Brothers.
C'est moins complexe et riche que Les lâches, puisque volontairement l'auteur a choisi la verve purement comique, même si on se sent une mélancolie par moment sous le rire. de même Danny est finalement peu présent, un peu à l'arrière plan.
Le personnage principal de ce roman est de nouveau Danny, le narrateur du roman Les lâches. Nous sommes maintenant en 1953, Danny a fini ses études et il a du partir faire son service militaire. L'escadron blindé est une impitoyable mais surtout irrésistible satire de la vie et des moeurs militaires en pleine époque stalinienne dans l'armée tchèque. Presque toute l'armée, des officiers au simple soldat de rang ne rêve que d'échapper à ses devoirs militaires de toutes les façons possibles et imaginables. Les exercices militaires tournent à la farce, et les séances embrigadement idéologique au grand guignol, les hommes opposant une sorte de force d'inertie subversive à toutes les tentatives de les faire marcher au pas. Une sorte de satire entre le soldat Chveik et les Marx Brothers.
C'est moins complexe et riche que Les lâches, puisque volontairement l'auteur a choisi la verve purement comique, même si on se sent une mélancolie par moment sous le rire. de même Danny est finalement peu présent, un peu à l'arrière plan.
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Arabella- Messages : 4799
Date d'inscription : 29/11/2016
Re: Josef Skvorecký
Les Lâches
Josef Skvorecky
C’est un beau roman, très finement bâti et raconté, autour de ce jeune homme qui entre de façon assez brutale dans l’histoire de son pays sans vraiment s’en rendre compte, avec la flamme et l’inconscience de son âge. J’ai trouvé la fin vraiment magnifique, à la fois pleine de nostalgie et d’espoir.
Josef Skvorecky
Alors, c’est l’histoire d’une bande de jeunes…ce résumé pourrait commencer comme ainsi. Le récit de ce roman se déroule sur une semaine, du 4 au 11 mai 1945 dans une petite ville de Tchécoslovaquie appelée Kostolec qui se situe à environ 150 km de Prague. Les jeunes en questions sont les musiciens d’un jazz band et c’est lors de l’une de leurs répétitions dans un bar que le roman s’ouvre.
La ville est encore occupée par les allemands, les forces alliées avancent et les troupes d’occupation n’en finissent pas de se retirer. Avec une ardeur toute juvénile, les jeunes gens se mettent en tête de libérer la ville avant l’arrivée des Russes mais à la suite de quiproquos et de confusion ils se trouvent enrôlés dans l’armée tchécoslovaque sous les ordres de très poussiéreux officiers de réserve, à faire des rondes inutiles dans les rues de la ville.
C’est Danny le saxophoniste amoureux qui est le personnage central du roman, il est insouciant, inconscient du danger et ne pense qu’à la belle Irena et à l’effet qu’il peut lui faire déguisé en révolutionnaire, puis en soldat. Sa candeur juvénile et ses préoccupations amoureuses en décalage total avec la gravité de la situation apportent beaucoup de fraîcheur et d’humour à l’épisode assez dramatique de la libération de Kostolec et à cette période de l’histoire.C’est un beau roman, très finement bâti et raconté, autour de ce jeune homme qui entre de façon assez brutale dans l’histoire de son pays sans vraiment s’en rendre compte, avec la flamme et l’inconscience de son âge. J’ai trouvé la fin vraiment magnifique, à la fois pleine de nostalgie et d’espoir.
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'La littérature est une maladie textuellement transmissible, que l'on contracte en général pendant l'enfance'. Jane Yolen.
domreader- Messages : 3551
Date d'inscription : 02/12/2016
Localisation : Ile de France
Re: Josef Skvorecký
Très chouette commentaire, Dom. Contente que le livre t'ai plu, si tu as envie de continuer avec l'auteur, je te conseille un livre non disponible en français, mais en anglais, considéré comme son chef d'oeuvre, L'ingénieur des âmes humaines.
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Je ne lis jamais un livre dont je dois écrire la critique ; on se laisse tellement influencer. (Oscar Wilde)
Arabella- Messages : 4799
Date d'inscription : 29/11/2016
Re: Josef Skvorecký
Arabella a écrit:Très chouette commentaire, Dom. Contente que le livre t'ai plu, si tu as envie de continuer avec l'auteur, je te conseille un livre non disponible en français, mais en anglais, considéré comme son chef d'oeuvre, L'ingénieur des âmes humaines.
Je note alors et je verrai si le peux le trouver. Tu te souviens du thème ?
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'La littérature est une maladie textuellement transmissible, que l'on contracte en général pendant l'enfance'. Jane Yolen.
domreader- Messages : 3551
Date d'inscription : 02/12/2016
Localisation : Ile de France
Re: Josef Skvorecký
Ce sont toujours les mêmes thèmes, il revient au même personnage, mais des années après, en forme de bilan d'une vie. Donc il reparle de l'époque de la deuxième guerre mondiale, puis de l'époque communiste, et enfin de son présent de professeur de littérature dans une université canadienne, le tout s'entremêlant. Le livre est construit en chapitres, chaque chapitre étant consacré à un grand écrivain. J'ai une critique quelque part, je vais la rechercher.
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Je ne lis jamais un livre dont je dois écrire la critique ; on se laisse tellement influencer. (Oscar Wilde)
Arabella- Messages : 4799
Date d'inscription : 29/11/2016
Re: Josef Skvorecký
Merci !
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'La littérature est une maladie textuellement transmissible, que l'on contracte en général pendant l'enfance'. Jane Yolen.
domreader- Messages : 3551
Date d'inscription : 02/12/2016
Localisation : Ile de France
Re: Josef Skvorecký
"L'ingénieur des âmes humaines"
Déjà une précision importante avant de commencer à vous parler de ce livre. Même si ce livre est cité dans plusieurs textes sous le titre français "L'ingénieur des âmes humaines", il n'a pas été traduit et publié en entier, un petit extrait se trouve toutefois dans le recueil de nouvelles le saxophone basse. Il est en revanche disponible en anglais pour ceux qui lisent dans cette langue.
Le titre vient de Staline, qui a qualifié les écrivains « des ingénieurs des âmes humaines », c'est le rôle qu'il leur assignait dans la société. Tout le roman est bâti autour des écrivains, chacun des longs sept chapitres du livre porte en titre le nom d'un écrivain : Poe, Hawthorne, Twain, Crane, Fitzgerald, Conrad, Lovecraft. Ce découpage n'a rien d'artificiel, car dans le roman, Danny, le personnage récurrent et si proche de l'auteur lui-même, est dans son présent à lui, professeur de littérature dans une université canadienne, et les six premiers écrivains sont dans l'ordre ceux dont il étudie les oeuvres avec ses étudiants. Mais Skvorecky a la faiblesse de croire que les grands écrivains nous parlent de nous, et de notre époque, quelle que soit l'époque à laquelle ils aient vécue, aussi éloignée dans le temps soit-elle. Et il essaie de le démontrer à ses étudiants, et à nous par la même occasion.
C'est un livre dont la construction est d'une extrême complexité, parce qu'au récit du présent canadien de Danny se mêlent les souvenirs d'époques précédentes, en particulier pendant la guerre, lorsqu'il devait travailler en usine, qu'il poursuivait de ses assiduités une jeune ouvrière, Nadia, et que pour la séduire, il a imaginé un sabotage. Et puis aussi des épisodes d'après guerre, lorsque le communisme était installé en Tchécoslovaquie.
Les récits de Danny à différents moments de sa vie, sont entrecoupés par des lettres, de gens qu'il a connu ou qu'il connaîtra, lui racontant les vies de ces personnes, plus ou moins importantes pour Danny à des moments clés de leurs existences. Quand je vous disais que c'est complexe… Mais Josef Skvorecky maîtrise parfaitement toute cette complexité, tous les fils se tissent petit à petit, et nous suivons progressivement tous les récits en cours jusqu'au dénouement. Si toutefois on peut considérer qu'il y a un dénouement dans la vraie vie, que l'on peut à un moment donné mettre le mot fin dans une vie comme dans un roman. Les analyses des oeuvres faites par Danny participent de l'intrigue, du sens que l'on peut donner à ce que vivent toutes ces personnes. Un hymne à la littérature, à ce qu'elle nous apporte, au-delà du simple plaisir, comment elle peut aider à comprendre le monde et se comprendre soit même. Tout cela sans rien de lourd ni de pesant, l'humour, l'ironie, la dérision, sont en permanence là, comme une mise à distance, une défense, parce que ce récit aurait pu être tragique et désespéré, et il l'est d'une certaine façon, déjà par les événements qu'il rapporte, il y des morts, des disparus, des souffrances innombrables, et surtout des souffrances que les hommes infligent aux autres, mais Josef Skvorecky évoque aussi un infini appétit de vivre, de trouver des satisfactions et du plaisir dans n'importe quel situation.
C'est terriblement humain, tendre mais très pessimiste, sur la nature humaine en particulier, une douce amertume, une tendresse cruelle, une lucidité acérée sans être blessante, s'entremêlent en permanence, pour donner un livre exceptionnel, d'une richesse infinie.
Déjà une précision importante avant de commencer à vous parler de ce livre. Même si ce livre est cité dans plusieurs textes sous le titre français "L'ingénieur des âmes humaines", il n'a pas été traduit et publié en entier, un petit extrait se trouve toutefois dans le recueil de nouvelles le saxophone basse. Il est en revanche disponible en anglais pour ceux qui lisent dans cette langue.
Le titre vient de Staline, qui a qualifié les écrivains « des ingénieurs des âmes humaines », c'est le rôle qu'il leur assignait dans la société. Tout le roman est bâti autour des écrivains, chacun des longs sept chapitres du livre porte en titre le nom d'un écrivain : Poe, Hawthorne, Twain, Crane, Fitzgerald, Conrad, Lovecraft. Ce découpage n'a rien d'artificiel, car dans le roman, Danny, le personnage récurrent et si proche de l'auteur lui-même, est dans son présent à lui, professeur de littérature dans une université canadienne, et les six premiers écrivains sont dans l'ordre ceux dont il étudie les oeuvres avec ses étudiants. Mais Skvorecky a la faiblesse de croire que les grands écrivains nous parlent de nous, et de notre époque, quelle que soit l'époque à laquelle ils aient vécue, aussi éloignée dans le temps soit-elle. Et il essaie de le démontrer à ses étudiants, et à nous par la même occasion.
C'est un livre dont la construction est d'une extrême complexité, parce qu'au récit du présent canadien de Danny se mêlent les souvenirs d'époques précédentes, en particulier pendant la guerre, lorsqu'il devait travailler en usine, qu'il poursuivait de ses assiduités une jeune ouvrière, Nadia, et que pour la séduire, il a imaginé un sabotage. Et puis aussi des épisodes d'après guerre, lorsque le communisme était installé en Tchécoslovaquie.
Les récits de Danny à différents moments de sa vie, sont entrecoupés par des lettres, de gens qu'il a connu ou qu'il connaîtra, lui racontant les vies de ces personnes, plus ou moins importantes pour Danny à des moments clés de leurs existences. Quand je vous disais que c'est complexe… Mais Josef Skvorecky maîtrise parfaitement toute cette complexité, tous les fils se tissent petit à petit, et nous suivons progressivement tous les récits en cours jusqu'au dénouement. Si toutefois on peut considérer qu'il y a un dénouement dans la vraie vie, que l'on peut à un moment donné mettre le mot fin dans une vie comme dans un roman. Les analyses des oeuvres faites par Danny participent de l'intrigue, du sens que l'on peut donner à ce que vivent toutes ces personnes. Un hymne à la littérature, à ce qu'elle nous apporte, au-delà du simple plaisir, comment elle peut aider à comprendre le monde et se comprendre soit même. Tout cela sans rien de lourd ni de pesant, l'humour, l'ironie, la dérision, sont en permanence là, comme une mise à distance, une défense, parce que ce récit aurait pu être tragique et désespéré, et il l'est d'une certaine façon, déjà par les événements qu'il rapporte, il y des morts, des disparus, des souffrances innombrables, et surtout des souffrances que les hommes infligent aux autres, mais Josef Skvorecky évoque aussi un infini appétit de vivre, de trouver des satisfactions et du plaisir dans n'importe quel situation.
C'est terriblement humain, tendre mais très pessimiste, sur la nature humaine en particulier, une douce amertume, une tendresse cruelle, une lucidité acérée sans être blessante, s'entremêlent en permanence, pour donner un livre exceptionnel, d'une richesse infinie.
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Arabella- Messages : 4799
Date d'inscription : 29/11/2016
Re: Josef Skvorecký
Le camarade joueur de jazz
Ce livre rassemble six textes de Josef Škvorecký, textes assez disparates, articles, une interview, dans la plupart de ces textes l'auteur évoque sa vie, essentiellement en Tchécoslovaquie, où en filigrane on entraperçoit l'histoire et le contexte du pays, son amour pour le jazz et la littérature nord-américaine.
Le premier texte, le plus long, « Je suis né à Nachod.. »raconte les jeunes années de l'auteur, jusqu'à son départ pour le Canada après les événements de 1968. Les lecteurs des romans et nouvelles de Josef Škvorecký y seront en terrain connu, il s'est beaucoup inspiré de sa vie pour tisser ses fictions, et Danny, son personnage récurrent et son alter ego, lui ressemble beaucoup. Avec beaucoup d'humour et d'auto-dérision, comme dans ses fictions, il nous parle de son enfance, de la deuxième guerre mondiale, de l'arrivée du communisme...Il évoque quelques personnes qu'il a côtoyé et qui sont devenus célèbres, comme Milos Forman. Il est juste beaucoup plus discret sur ses relations avec les femmes que dans ses romans.
Les autres textes, plus courts, sont en quelque sorte complémentaires, dans un il évoque son amour des livres, dans un autre son apprentissage des langues, de l'allemand auprès du chantre de la synagogue, mort ensuite dans les camps nazis, et de l'anglais pour l'amour de Judy Garland...Deux autres évoquent le jazz, et le dernier est une interview, donnée à Prague, dans un moment de dégel, juste avant que les événements n'obligent Josef Škvorecký à quitter le pays sans espoir de retour.
Evidemment, c'est moins essentiel que les oeuvres de fiction, ses grands romans ou nouvelles. Mais pour un lecteur qui apprécie cette oeuvre riche et dense, c'est un délice. On retrouve la belle plume de l'auteur des Lâches, son humour, sa capacité de mettre à distance les sujets les plus graves, non pas pour les escamoter, mais pour pouvoir les affronter, en gardant une part d'humanité dans les situations les plus inhumaines. Sans se poser en héros ni en modèle, il décrit les choix de sa vie, personnelles et artistiques, comme une évidence.
C'est un vrai crève-coeur que ses livres soient si difficiles à trouver en France, son chef d'oeuvre, L'ingénieur des âmes humaines n'a toujours pas été traduit.
Ce livre rassemble six textes de Josef Škvorecký, textes assez disparates, articles, une interview, dans la plupart de ces textes l'auteur évoque sa vie, essentiellement en Tchécoslovaquie, où en filigrane on entraperçoit l'histoire et le contexte du pays, son amour pour le jazz et la littérature nord-américaine.
Le premier texte, le plus long, « Je suis né à Nachod.. »raconte les jeunes années de l'auteur, jusqu'à son départ pour le Canada après les événements de 1968. Les lecteurs des romans et nouvelles de Josef Škvorecký y seront en terrain connu, il s'est beaucoup inspiré de sa vie pour tisser ses fictions, et Danny, son personnage récurrent et son alter ego, lui ressemble beaucoup. Avec beaucoup d'humour et d'auto-dérision, comme dans ses fictions, il nous parle de son enfance, de la deuxième guerre mondiale, de l'arrivée du communisme...Il évoque quelques personnes qu'il a côtoyé et qui sont devenus célèbres, comme Milos Forman. Il est juste beaucoup plus discret sur ses relations avec les femmes que dans ses romans.
Les autres textes, plus courts, sont en quelque sorte complémentaires, dans un il évoque son amour des livres, dans un autre son apprentissage des langues, de l'allemand auprès du chantre de la synagogue, mort ensuite dans les camps nazis, et de l'anglais pour l'amour de Judy Garland...Deux autres évoquent le jazz, et le dernier est une interview, donnée à Prague, dans un moment de dégel, juste avant que les événements n'obligent Josef Škvorecký à quitter le pays sans espoir de retour.
Evidemment, c'est moins essentiel que les oeuvres de fiction, ses grands romans ou nouvelles. Mais pour un lecteur qui apprécie cette oeuvre riche et dense, c'est un délice. On retrouve la belle plume de l'auteur des Lâches, son humour, sa capacité de mettre à distance les sujets les plus graves, non pas pour les escamoter, mais pour pouvoir les affronter, en gardant une part d'humanité dans les situations les plus inhumaines. Sans se poser en héros ni en modèle, il décrit les choix de sa vie, personnelles et artistiques, comme une évidence.
C'est un vrai crève-coeur que ses livres soient si difficiles à trouver en France, son chef d'oeuvre, L'ingénieur des âmes humaines n'a toujours pas été traduit.
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Je ne lis jamais un livre dont je dois écrire la critique ; on se laisse tellement influencer. (Oscar Wilde)
Arabella- Messages : 4799
Date d'inscription : 29/11/2016
Re: Josef Skvorecký
Merci, je regarderai s'il est en bibliothèque, il n'est pas évident à trouver ceci dit.
Et comme tu le dis, quel dommage qu'il ne soit pas plus traduit :-(
Et comme tu le dis, quel dommage qu'il ne soit pas plus traduit :-(
Aeriale- Messages : 11779
Date d'inscription : 30/11/2016
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Books en Stock :: Hey Billie Y'a quoi dans ta bibliothèque ? :: Littérature russe, d'Europe Centrale et Orientale
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