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Nicolas Bouvier

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Message par Merlette Dim 11 Déc 2016 - 16:46

Nicolas Bouvier  Nicola10



Nicolas Bouvier (1929-1998), écrivain, poète, photographe, dessinateur est né et mort près de Genève après une vie de voyages. Outre L’Usage du monde, son oeuvre la plus connue, il est notamment l’auteur de Chronique japonaise, Le Poisson-Scorpion, Le Dehors et le Dedans, Journal d’Aran et d’autres lieux.


(présentation éditeur)

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Message par Merlette Dim 11 Déc 2016 - 16:53

L'usage du monde
1963
Nicolas Bouvier  41-fcg10


L'usage du monde retrace le premier grand voyage de Nicolas Bouvier, à l'âge de 23 ans, en compagnie du peintre Thierry Vernet. Un périple en voiture qui les mènera de Belgrade à Kaboul, en passant par la Macédoine, la Turquie, l'Azerbaidjan, l'Iran, le Pakistan, l'Afghanistan...
La même écriture très évocatrice , ici peut-être plus dense, entre journalisme et poésie, cet art de croquer sur le vif portrait sur portrait (hommes, peuples, villes, pays et paysages, atmosphères...), avec réalisme, humour et souvent tendresse.
Bouvier sait nous faire partager à merveille ses découvertes et éblouissements :
Mais il y a ici des platanes comme on n'en voit qu'en songe, immenses, chacun capable d'abriter plusieurs petits cafés où l'on passerait bien sa vie. Et surtout il y a le bleu. Il faut venir jusqu'ici pour découvrir le bleu. Dans les Balkans déjà, l'oeil s'y prépare; en Grèce il domine mais il fait l'important: un bleu agressif, remuant comme la mer, qui laisse encore percer l'affirmation, les projets, une sorte d'intransigeance. Tandis qu'ici! Les portes des boutiques, les licous des chevaux, les bijoux de quatre sous: partout cet inimitable bleu persan qui allège le coeur, qui tient l'Iran à bout de bras, qui s'est éclairé et patiné avec le temps comme s'éclaire la palette d'un grand peintre. Les yeux de lapis des statues akkadiennes, le bleu royal des palais parthes, l'émail plus clair de la poterie seldjoukide, celui des mosquées sefévides, et maintenant, ce bleu qui s'envole , à l'aise avec les ocres du sable, avec le vert poussiéreux des feuillages, avec la neige, avec la nuit.
Ce qui fascine dans les écrits de Bouvier est la lenteur et la richesse d'un périple aux antipodes de la vacuité du tourisme de masse, même lointain.
Le voyageur à la Bouvier, loin du confort et de la sécurité, fait sien le proverbe afghan:

Prendre son temps est le meilleur moyen de n'en pas perdre.

Il s'attarde plusieurs mois dans une ville (Belgrade, Tabriz, Téhéran,Quetta...), le temps d'y gagner de quoi poursuivre la route, réparer la voiture, mais surtout de s'imprégner de l'esprit des lieux et ainsi apprendre au contact de leurs habitants.
La plupart des populations rencontrées, en dépit (ou à cause) de la misère, de la maladie, des privations ou des troubles politiques, lui enseignent le "Carpe Diem", l'art de goûter le moment présent et ses petits bonheurs, profiter aussi intensément que possible de ces instants qui constituent la véritable "ossature de l'existence".
Le voyage, "l'usage du monde" est donc une leçon de vie, voire une nécessité vitale. C'est arrivé aux portes de l'Inde, face au panorama grandiose du Khyber Pass, que Nicolas Bouvier réalise sa pleine appartenance au monde en même temps que la fugacité d'une telle sensation:
Comme une eau, le monde nous traverse et pour un temps vous prête ses couleurs. Puis se retire, et vous replace devant ce vide qu'on porte en soi, devant cette insuffisance centrale de l'âme qu'il faut bien apprendre à cotoyer, à combattre, et qui, paradoxalement, est peut-être notre moteur le plus sûr.
Le périple se poursuivra à Ceylan ( raconté dans Le Poisson-Scorpion), puis au Japon...

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Message par Merlette Dim 11 Déc 2016 - 16:58

Chronique japonaise
1975
Nicolas Bouvier  51xpti10


Chronique Japonaise est un livre qui m'a plu d'emblée. Sur sa couverture une estampe de Hokusai montre un tanuki , blaireau magique, dissimulant son corps rond d'animal sous d'amples vêtements humains, et s'inclinant légèrement sur le côté, dans une posture mi-salutation mi-invite, comme si nous venions de pousser la porte de sa hutte. Il ressemble à un conteur nous conviant à prendre place au coin du feu et à l'écouter jusqu'aux petites heures de la nuit.
Et c'est bien le ton chaleureux, familier et captivant du conteur que Nicolas Bouvier adopte, pour juxtaposer chronique historique et chronique personnelle, le carnet de ses voyages au Japon, entre 1955 et 65.
Cette nuit j'ai vu en rêve toute l'histoire japonaise alignée comme une suite d'images d'Epinal aux couleurs acides, avec ici ou là un gros plan sur un visage stupéfait ou contrit. A peu près ce qu'un enfant verrait dans une lanterne magique.
A ceci près que ces images n'ont rien de figé et que l'auteur donne ainsi chair et vie à l'Histoire, à la façon du montreur d'images du quartier populaire d'Araki-Chô, à Tôkyô, où il résida plusieurs mois:
En contrebas de la rue, un sanctuaire shinto dédié à Inari, déesse de la Nourriture, et à son compère et messager le renard Kitsune, partage avec une scierie le fond d'une petite combe herbue. Par temps calme, parmi les minces fumées d'encens, on en entend monter les glapissements du Kamishibaï San (Monsieur Théâtre-en-Papier), en train d'ensorceler sa clientèle enfantine. Dans une caisse fixée sur son vélo, il insère une douzaine d'images de carton et les retire à mesure pour illustrer l'histoire qu'il psalmodie d'une invraisemblable voix rotée, tantôt plaintive et tantôt menaçante. Ogres, gansters, dragons, duels. Les styles et les mythologies se mélangent très librement; on voit un tigre ramper aux pieds de la Vierge Marie, un samouraï piloter un sous-marin.
Les visages sur lesquels il s'attarde (celui, médusé, de l'empereur chinois Tang-Yi apprenant par missive officielle la création de l'"Empire du Soleil-Levant", au 7e siècle ; celui du perplexe maire de la bourgade de Kyushu où vient d'accoster, en 1543, une jonque chargée des premiers Européens; celui du général Oda Nobunaga, mitraillant les missionnaires jésuites de questions lors de réceptions bien arrosées...) prennent autant de réalité que ceux des habitants modestes de la Shitamachi, les quartiers populaires de Tôkyô, dont il partagea la vie. Les baigneurs jovials du sento (le bain public), les artisans, les flics trompant l'ennui en jouant interminablement au go, les citadins accablés et rendus fous par la canicule d'août, les prostituées venues des campagnes(celles de La Rue de la Honte de Mizoguchi), les paysans célébrant un frénétique matsuri hivernal ...
En bref, un pays et un peuple , dont Nicolas Bouvier souligne avec humour les qualités et les travers, un Japon loin des clichés, méconnu et aujourd'hui disparu, aussi "frugal, introverti et pathétique " que truculent et festif , entre "Brueghel et Hokusai". L'austérité du Nô et du bouddhisme zen sont également évoqués, mais dans la pénombre de la salle de nô, les spectateurs sont de petits vieux malicieux qui vont discrètement prendre le thé ou un peu d'air pendant les récitatifs, et dans celle du Temple de la Grande Vertu, "un bouddha de bois doré haut de dix mètres sourit de voir ses fidèles manoeuvrer si adroitement et marcher - avec quelle prudence - sur des oeufs qui n'existent pas."
Autant d'anecdotes et d'atmosphères qui vont se nicher dans notre mémoire, de façon aussi marquante que si nous les avions réellement vécues. Un de ces livres rares qu'on absorbe plus qu'on ne lit - d'autant plus que le saké y coule à flots...

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Message par kenavo Lun 12 Déc 2016 - 5:54

ce sont ces deux livres qui m'ont le plus marqué, parmi ceux que j'ai lu de lui, surtout L'usage du monde, première rencontre avec Nicolas Bouvier

je l'ai lu en version allemande
oui, je sais, chose terrible, mais c'était en 2002 et à ce moment je ne lisais plus du tout en français, langue que j'avais délaissé après les années scolaires
Nicolas Bouvier  A95

dès que je vois son nom, c'est cette image de couverture qui me vient à l'esprit... envie de me remettre avec lui dans cette voiture et partir pour un autre voyage fascinant...

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Message par Merlette Lun 12 Déc 2016 - 11:17

Kenavo a écrit:
dès que je vois son nom, c'est cette image de couverture qui me vient à l'esprit... envie de me remettre avec lui dans cette voiture et partir pour un autre voyage fascinant...

Pareil, qu'est-ce qu'on attend d'ailleurs?! Smile

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Message par kenavo Lun 12 Déc 2016 - 12:36

Céline a écrit:Pareil, qu'est-ce qu'on attend d'ailleurs?! Smile
en effet, je le remets sur ma liste des livres à (re)lire en 2017!

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Message par Nightingale Ven 31 Mar 2023 - 14:35

La Guerre à huit ans

Nicolas Bouvier  97828817

Les éditions Zoé propose ici trois courts textes autobiographiques de Nicolas Bouvier (pour une soixantaine de pages au total).

Dans le premier texte "Souvenirs, souvenirs", Nicolas Bouvier digresse autour de la question des souvenirs, de la mémoire (essentiels à l'écrivain-voyageur), et évoque la question de l'enfance ou de la vieillesse. L'enfance qui n'est pas un âge, mais un état, selon lui, et qu'il s'emploie à définir selon deux aspects positif et négatif.

Le deuxième texte "Thesaurus Pauperum, ou la Guerre à huit ans", est une très belle évocation des années d'enfance de l'auteur.
Situé juste avant guerre, ce récit met en scène ses parents, ses grands-parents, ses découvertes d'enfants, pour aboutir à la guerre qu'enfant il va déclarer à la gouvernante prussienne Bertha... juste avant que la vraie guerre n'éclate.

Quelques pages seulement pour le troisième texte "Bibliothèques", sorte d'hommage à son père et à sa mère, et creuset de son amour des livres et des mots.

Une lecture ultra-rapide pour ces quelques pages, dans un style particulièrement ciselé, certaines phrases que l'on déguste littéralement...
On sent l'amour des mots, et de toute évidence une certaine érudition chez l'auteur.
Chouette petit moment. Smile

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Genève, rue des Granges : Claude, Henriette et Nicolas Bouvier près de l'arbre de Noël, 1939.
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Message par kenavo Sam 1 Avr 2023 - 0:46

ah oui, cela me donne envie de retrouver Nicolas Bouvier
merci pour la piste de lecture...

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Message par kenavo Mar 11 Avr 2023 - 4:16



La guerre a huit ans

Merci pour cette piste de lecture Nightingale.

Ensuite j’ai déniché une ancienne émission de 1 livre 1 jour qui en parle aussi très bien de ce livre.

À part poster cet extrait, je ne vois pas ce que je pourrais encore ajouter Wink


Extrait

Contrairement à ce que l'on nous serine, la part claire et lumineuse de l'enfance n'est jamais perdue corps et biens. L'a-t-on oubliée quelque part, il faut aller la rechercher comme un bagage perdu. L'enfance, plus qu'un âge est un état d'esprit. C'est une attention fébrile aux êtres et aux choses, une impatience d'absorption qui permet, pour de brefs instants, de saisir le monde dans sa polyphonie – il est toujours polyphonique – et de ne pas se contenter d'une lecture monodique où l'on ne suit qu'une ligne de la partition, ce que nous faisons trop souvent par lassitude, résignation, ou par ce qu'Antonin Artaud appelait, avec une justesse cruelle, «insuffisance centrale de l'âme». Or, cet état d'éveil peut se maintenir à n'importe quel âge, au prix, bien entendu, d'une vigilance continuelle. Le problème, la plus grande difficulté, c'est qu'il faut découpler cette perception fraîche et native de l'enfance de la stupidité craintive et répétitive qui est aussi l'enfance. Si ce découplage réussit, on se retrouve vieillir plus heureux et, plus important encore, plus léger, la légèreté étant, chacun le sait, le meilleur apprentissage de la mort. C'est un pari difficile, mais en aucune façon impossible.
A quarante ans, Paul Klee écrit dans son «journal de peintre», «j'aimerais peindre et dessiner comme un enfant de six ans». Non seulement il y est parvenu mais, grâce à son bagage culturel, son immense réflexion visuelle et son humour, il a plutôt peint comme un enfant de six cents ans.
Charles-Albert Cingria parle très peu, sinon pas du tout, de son enfance pourtant heureuse et fortunée – une famille dalmato-polonaise qui savait vivre et où l'on se déguisait tout le temps, juste pour le plaisir. Son enfance, il la portera cependant avec lui, comme un très léger baluchon, malgré l'alcoolisme et une condition de vrai clochard, jusqu'à son dernier souffle. Jusqu'à la fin son écriture conserve une finesse d'observation et une capacité d'émerveillement absolument intactes.
Le Charles Trénet qui, voici quelques années encore, chantait «Une noix» ou «La folle complainte» était un enfant de quatre-vingts ans, d'une grande maîtrise et maturité poétique. Ne jetons pas l'éponge : ce sont d'excellentes nouvelles pour nos carcasses fragiles, usées, fatiguées.
Je n'ai presque pas écrit sur mon enfance, et je ne pourrais vous dire si je l'ai vraiment aimée. D'incessants voyages, entrepris dès l'âge de quinze ans – peut-être justement pour m'en sortir – et dont certains (pas tous) demandaient avec insistance à être racontés m'ont soustrait à cette malédiction du plumier natal. Elle m'a cependant frappé une ou deux fois: d'où le texte qui sui
t.

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