Sana Krasikov
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Sana Krasikov
Sana Krasikov
Source : le site de l'éditeur
Née en Ukraine en 1979, Sana Krasikov a grandi dans l’ancienne république soviétique de Géorgie avant d’émigrer aux États-Unis avec sa famille. Elle est l’auteur d’un recueil de nouvelles, L’An prochain à Tbilissi (Albin Michel, 2011), récompensé par le O. Henry Award et le prix Sami Rohr. Elle a consacré neuf années à l’écriture des Patriotes, premier roman qui lui a valu d’être distinguée par la revue britannique Granta comme l’un des vingt meilleurs jeunes écrivains américains de cette décennie.
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Je ne lis jamais un livre dont je dois écrire la critique ; on se laisse tellement influencer. (Oscar Wilde)
Arabella- Messages : 4775
Date d'inscription : 29/11/2016
Re: Sana Krasikov
L'an prochain à Tbilissi
Huit nouvelles, qui racontent des bouts de vie, des gens venus de l'ex-URSS aux Etats-Unis. Ils y ont plus ou moins « réussi », tout au moins sur le plan matériel ou social. Parce que tous portent un eux un manque, une nostalgie, la blessure plus ou moins profonde du déracinement. Ils sont orthodoxes, juifs, musulmans, ils ont vécu ou pas des expériences difficiles dans leur pays d'origine, ils en vivent parfois dans leur pays d'adoption. Mais au-delà du factuel, Sana Krasikov parvient à capter l'instant fugace de la sensation et du ressenti le plus profond et indicible, une sorte de faille profonde, un manque difficile à définir de quelque chose de perdu en route. Par le fait d'émigrer bien sûr. Mais pas seulement, parce que pour ceux qui tentent le retour les choses ne sont pas plus faciles. Et au-delà des solitudes de ces personnes déplacées, il y a les solitudes non moins fortes des autochtones qu'ils côtoient dans leur vie quotidiennes, pas moins réelles et pathétiques.
Ce livre est un véritable miracle de justesse. Rien de trop et rien qui manque. Sana Krasikov décrit ces vies au scalpel, avec une précision quasi chirurgicale, un regard d'une acuité auquel nul geste, nulle parole signifiante n'échappe. Mais en même une empathie et une grande tendresse pour les personnages font que ce n'est jamais cruel ou par trop ironique, elle ne les épingle pas comme des papillons dans une collection, mais les regarde vivre sans complaisance mais douceur. Et ces histoires qui auraient pu être pathétiques ou très tristes ne donnent jamais dans le pathos, parce que la petite touche d'ironie et la précision de la description permettent toujours de l'éviter. C'est profondément humain tout en restant lucide. Un mélange de grands nouvellistes américains et leurs descriptions au plus juste et des grands nouvellistes russes dans le ressenti et la nostalgie. Une alliance à priori impossible, mais au combien réussie.
Il y a peu d'auteurs dont j'attends les prochaines parutions, et bien Sana Krasikov est un des rares écrivains dont je guette le prochain livre.
Huit nouvelles, qui racontent des bouts de vie, des gens venus de l'ex-URSS aux Etats-Unis. Ils y ont plus ou moins « réussi », tout au moins sur le plan matériel ou social. Parce que tous portent un eux un manque, une nostalgie, la blessure plus ou moins profonde du déracinement. Ils sont orthodoxes, juifs, musulmans, ils ont vécu ou pas des expériences difficiles dans leur pays d'origine, ils en vivent parfois dans leur pays d'adoption. Mais au-delà du factuel, Sana Krasikov parvient à capter l'instant fugace de la sensation et du ressenti le plus profond et indicible, une sorte de faille profonde, un manque difficile à définir de quelque chose de perdu en route. Par le fait d'émigrer bien sûr. Mais pas seulement, parce que pour ceux qui tentent le retour les choses ne sont pas plus faciles. Et au-delà des solitudes de ces personnes déplacées, il y a les solitudes non moins fortes des autochtones qu'ils côtoient dans leur vie quotidiennes, pas moins réelles et pathétiques.
Ce livre est un véritable miracle de justesse. Rien de trop et rien qui manque. Sana Krasikov décrit ces vies au scalpel, avec une précision quasi chirurgicale, un regard d'une acuité auquel nul geste, nulle parole signifiante n'échappe. Mais en même une empathie et une grande tendresse pour les personnages font que ce n'est jamais cruel ou par trop ironique, elle ne les épingle pas comme des papillons dans une collection, mais les regarde vivre sans complaisance mais douceur. Et ces histoires qui auraient pu être pathétiques ou très tristes ne donnent jamais dans le pathos, parce que la petite touche d'ironie et la précision de la description permettent toujours de l'éviter. C'est profondément humain tout en restant lucide. Un mélange de grands nouvellistes américains et leurs descriptions au plus juste et des grands nouvellistes russes dans le ressenti et la nostalgie. Une alliance à priori impossible, mais au combien réussie.
Il y a peu d'auteurs dont j'attends les prochaines parutions, et bien Sana Krasikov est un des rares écrivains dont je guette le prochain livre.
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Je ne lis jamais un livre dont je dois écrire la critique ; on se laisse tellement influencer. (Oscar Wilde)
Arabella- Messages : 4775
Date d'inscription : 29/11/2016
Re: Sana Krasikov
oh oui, je me rappelle bien de ton commentaire qui m'avait donné envie de tenter cette lecture moi-même...
j'avais adoré et tout comme toi, j'attendais du nouveau d'elle
je vois que ce sera fait en août avec un roman (malheureusement un pavé)... je vais attendre ton verdict
j'avais adoré et tout comme toi, j'attendais du nouveau d'elle
je vois que ce sera fait en août avec un roman (malheureusement un pavé)... je vais attendre ton verdict
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Life is a lot like Jazz
Best when you improvise
George Gershwin
Re: Sana Krasikov
Les pavés ne me font pas peur...
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Je ne lis jamais un livre dont je dois écrire la critique ; on se laisse tellement influencer. (Oscar Wilde)
Arabella- Messages : 4775
Date d'inscription : 29/11/2016
Re: Sana Krasikov
Les patriotes
Il s'agit d'une immense fresque, se déroulant sur trois quart de siècle, entre les USA et ce qui était l'URSS et ce qui est redevenu la Russie. Nous suivons les destinées de Florence, depuis le début des années 30 du siècle dernier. Fille d'immigré juifs originaires de Russie, elle fait des brillantes études de mathématiques, mais travailler, surtout pour une femme, est difficile pendant la grande dépression. Elle trouve un peu par hasard, un peu grâce à sa maîtrise du russe, un emploi dans un organisme soviétique, organisant l'import de technologies américaines, et tombe amoureuse d'un ingénieur en visite. Pour le retrouver, pour fuir le carcan de la vie familiale étriquée, par idéalisme et envie de participer à quelque chose qui lui paraît être l'avenir, elle décide de partir pour l'URSS. Elle va découvrir progressivement la réalité du régime, mais le piège s'est refermée sur elle, et elle ne peut plus quitter le pays. Elle va donc vivre toute l'histoire soviétique, jusqu'au début des années 80, où elle finira par rentrer chez elle, avec son fils et ses petits enfants. Elle est le personnage principal du livre, mais à son destin se mêlent les voix de son fils, Julian, et de son petit fils Lenny. Tous les deux nés en URSS, n'arrivent pas d'une certaine façon de s'en détacher : Julian travaille pour une société qui l'y envoie régulièrement et Lenny s'y est même réinstallé. Cela permet d'avoir un aperçu des transformations et de l'histoire plus récente, jusqu'en 2008.
Le petit résumé ci-dessus montre à quel point le livre est ambitieux : il s'agit de balayer l'histoire sur une immense période, et d'aborder tous les incontournables : les purges staliniennes, la seconde guerre mondiale, le complot des blouses blanches et les répressions contre les juifs, le goulag, les transformations des années 80, le fonctionnement mafieux de l'actuelle Russie...Et comme fil rouge, une thématique moins connue, celle des Américains (et plus largement des Occidentaux) venus en URSS et empêchés d'en sortir. Tout cela grâce au destin d'une famille. La construction que entremêle les époques et les différents personnages est très sophistiquée, et permet de maintenir la curiosité du lecteur en permanent éveil : un petit détail lâché ici ou là, nous fait nous interroger sur ce qui s'est vraiment passé à un autre moment, et nous attendons avec impatience d'en savoir plus. C'est très maîtrisé, et cela rend le livre très passionnant à suivre.
J'avoue avoir embarqué quasiment sans restriction au départ, et avoir pris du plaisir à lire ce livre efficace et très bien fait. Mais au fur et à mesure, j'ai commencé à le trouver peut-être un peu trop efficace justement, sans le petit plus personnel réellement inspiré, qui en ferait quelque chose d'exceptionnel. La fin, un peu trop optimiste et volontaire, ne m'a pas non plus convaincue. Voir des personnages tenir tête et d'une certaine façon obtenir gain de cause face aux sbires du NKVD (l'ancêtre du KGB) et de la mafia russe actuelle, est certes réconfortant mais pas très réaliste à mon sens. Je suis donc un peu mitigée : incontestablement un livre bien fait et dans l'ensemble qui se lit très bien, mais qui n'échappe pas à quelques facilités. Sur les sujets abordés dans ce roman, il y a, me semble-t-il des oeuvres plus essentielles, même si peut être plus complexes à appréhender. A réserver surtout à ceux qui connaissent moins le contexte, et/ou qui privilégient le romanesque pour mieux découvrir une époque historique.
Il s'agit d'une immense fresque, se déroulant sur trois quart de siècle, entre les USA et ce qui était l'URSS et ce qui est redevenu la Russie. Nous suivons les destinées de Florence, depuis le début des années 30 du siècle dernier. Fille d'immigré juifs originaires de Russie, elle fait des brillantes études de mathématiques, mais travailler, surtout pour une femme, est difficile pendant la grande dépression. Elle trouve un peu par hasard, un peu grâce à sa maîtrise du russe, un emploi dans un organisme soviétique, organisant l'import de technologies américaines, et tombe amoureuse d'un ingénieur en visite. Pour le retrouver, pour fuir le carcan de la vie familiale étriquée, par idéalisme et envie de participer à quelque chose qui lui paraît être l'avenir, elle décide de partir pour l'URSS. Elle va découvrir progressivement la réalité du régime, mais le piège s'est refermée sur elle, et elle ne peut plus quitter le pays. Elle va donc vivre toute l'histoire soviétique, jusqu'au début des années 80, où elle finira par rentrer chez elle, avec son fils et ses petits enfants. Elle est le personnage principal du livre, mais à son destin se mêlent les voix de son fils, Julian, et de son petit fils Lenny. Tous les deux nés en URSS, n'arrivent pas d'une certaine façon de s'en détacher : Julian travaille pour une société qui l'y envoie régulièrement et Lenny s'y est même réinstallé. Cela permet d'avoir un aperçu des transformations et de l'histoire plus récente, jusqu'en 2008.
Le petit résumé ci-dessus montre à quel point le livre est ambitieux : il s'agit de balayer l'histoire sur une immense période, et d'aborder tous les incontournables : les purges staliniennes, la seconde guerre mondiale, le complot des blouses blanches et les répressions contre les juifs, le goulag, les transformations des années 80, le fonctionnement mafieux de l'actuelle Russie...Et comme fil rouge, une thématique moins connue, celle des Américains (et plus largement des Occidentaux) venus en URSS et empêchés d'en sortir. Tout cela grâce au destin d'une famille. La construction que entremêle les époques et les différents personnages est très sophistiquée, et permet de maintenir la curiosité du lecteur en permanent éveil : un petit détail lâché ici ou là, nous fait nous interroger sur ce qui s'est vraiment passé à un autre moment, et nous attendons avec impatience d'en savoir plus. C'est très maîtrisé, et cela rend le livre très passionnant à suivre.
J'avoue avoir embarqué quasiment sans restriction au départ, et avoir pris du plaisir à lire ce livre efficace et très bien fait. Mais au fur et à mesure, j'ai commencé à le trouver peut-être un peu trop efficace justement, sans le petit plus personnel réellement inspiré, qui en ferait quelque chose d'exceptionnel. La fin, un peu trop optimiste et volontaire, ne m'a pas non plus convaincue. Voir des personnages tenir tête et d'une certaine façon obtenir gain de cause face aux sbires du NKVD (l'ancêtre du KGB) et de la mafia russe actuelle, est certes réconfortant mais pas très réaliste à mon sens. Je suis donc un peu mitigée : incontestablement un livre bien fait et dans l'ensemble qui se lit très bien, mais qui n'échappe pas à quelques facilités. Sur les sujets abordés dans ce roman, il y a, me semble-t-il des oeuvres plus essentielles, même si peut être plus complexes à appréhender. A réserver surtout à ceux qui connaissent moins le contexte, et/ou qui privilégient le romanesque pour mieux découvrir une époque historique.
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Arabella- Messages : 4775
Date d'inscription : 29/11/2016
Re: Sana Krasikov
A réserver surtout à ceux qui connaissent moins le contexte, et/ou qui privilégient le romanesque pour mieux découvrir une époque historique.
Tout moi ça !
Ça me donne envie.
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Et, du monde indistinct des rêves, là où se terrent les secrets mystiques, une réponse surgit.
Queenie- Messages : 6939
Date d'inscription : 29/11/2016
Localisation : *CabanCouette*
Re: Sana Krasikov
Ha ha, pareil!Queenie a écrit:A réserver surtout à ceux qui connaissent moins le contexte, et/ou qui privilégient le romanesque pour mieux découvrir une époque historique.
Tout moi ça !
Ça me donne envie.
Je me faisais la même remarque. C'est noté quand même (mais je crains l'épaisseur)
Aeriale- Messages : 11315
Date d'inscription : 30/11/2016
Re: Sana Krasikov
Bon, penser à faire des commentaires réservés pour donner envie de lire...
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Arabella- Messages : 4775
Date d'inscription : 29/11/2016
Re: Sana Krasikov
Arabella a écrit:Bon, penser à faire des commentaires réservés pour donner envie de lire...
Tous les moyens sont bons !
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Et, du monde indistinct des rêves, là où se terrent les secrets mystiques, une réponse surgit.
Queenie- Messages : 6939
Date d'inscription : 29/11/2016
Localisation : *CabanCouette*
Re: Sana Krasikov
Arabella a écrit:Bon, penser à faire des commentaires réservés pour donner envie de lire...
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Lire nuit gravement à la bêtise !
Nightingale- Messages : 2622
Date d'inscription : 09/12/2017
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