Virgile
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Virgile
Virgile (-70/ -19)
Source : Vikidia
Virgile (Publius Vergilius Maro en latin) est né en 70 av. J-C près de Mantoue (en Gaule Cisalpine au nord de l'Italie) et mort en 19 av. J-C à Brindes (aujourd'hui Brindisi au sud de l'Italie). Il est considéré comme le plus grand poète latin.
Virgile a grandi à la campagne. Sa famille appartient à la petite bourgeoisie. Son père était probablement un petit propriétaire terrien.
Il fait des études approfondies dans divers domaines : lettres, philosophie, droit, médecine et mathématiques. Il étudie à Crémone, Milan et Rome. Il abandonne le métier d'avocat et renonce à une carrière politique en raison d'une santé fragile pour se consacrer à la poésie, sa passion. Il ne participe pas aux guerres civiles qui secouent son pays au moment de la fin de la République romaine.
Virgile est ami avec Catulle et Horace, deux autres poètes latins célèbres. Le poète est d'abord protégé par Pollion, un gouverneur et chef d'armées, puis par Mécène, un homme d’état proche d'Octave, le futur empereur Auguste. La protection de ces hommes puissants et de l'empereur lui permet de se consacrer à sa poésie. Il écrit deux de ses oeuvres les plus célèbres, Les Georgiques et l’Énéide en l'honneur d'Auguste.
Virgile consacre les dix dernières années à l'écriture de l’Énéide. Il meurt à Brindes en 19 av. J-C après un voyage de travail en Grèce. Avant de mourir, il demande qu'on brûle l’Énéide, sa dernière oeuvre, car il n'a pas eu le temps de l'achever. Mais l'empereur Auguste empêche la destruction de cette oeuvre qui est devenue la plus célèbre du poète.
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Je ne lis jamais un livre dont je dois écrire la critique ; on se laisse tellement influencer. (Oscar Wilde)
Arabella- Messages : 4737
Date d'inscription : 29/11/2016
Re: Virgile
Les Bucoliques
Après avoir découvert récemment, avec un immense plaisir, les Idylles de Théocrite, j'ai voulu poursuivre avec une oeuvre peut-être un peu plus célèbre, qui s'en est inspiré, les Bucoliques de Virgile.
Virgile vécut en des temps troublés, au premier siècle avant notre ère. Époque de persistantes et violentes guerres civiles, en particulier après l'assassinat de Jules César en -44. Et c'est à ce moment de tensions extrêmes, qu'en 42 Virgile écrit les premiers poèmes du cycle, qui en comprend dix. Des histoires de bergers, de troupeaux, d'amour, de disputes, mais aussi de poésie, qui paraissent en décalage total avec la réalité des temps violents pendant lesquels ces textes ont été écrits.
Peut-être pas complètement en décalage quand même : la Première et la Neuvième Bucoliques évoquent la situation critique des personnes expropriées du jour au lendemain, pour que leurs terres soient données aux vétérans des armées vainqueurs. Mélibée, parmi d'autres, doit partir avec son troupeau de chèvres, en train de dépérir en chemin, alors que Tityre, grâce à une rencontre faite à Rome, peut garder son bien et continuer à mener une vie heureuse. Aucun d'une certaine manière ne mérite son sort, qui au final est le fruit d'un hasard, heureux pour l'un, malheureux pour l'autre.
Dans la Neuvième Bucolique, deux hommes marchent, l'un doit amener des bêtes à leur nouveau maître. Ils espèrent l'arrivée d'un certain Ménalque, poète de son état, qui malgré des bruits qui ont couru, et son immense talent, n'a pas été épargné, et a même peut-être été tué. Pour se réconforter, et pour conjurer leurs angoisses, ils récitent de la poésie, celle de Ménalque et la leur.
Dans le quatrième poème, assez mystérieux, et qui a fait couler beaucoup d'encre, est évoquée la naissance d'un enfant miraculeux, qui pourrait faire revenir l'humanité à l'âge d'or. Virgile raconte en passant, l'histoire de l'humanité, telle que se l'imaginait les Romains de l'époque, une histoire sous forme de mythes.
D'autres Bucoliques parlent d'amour, un amour en général à sens unique. Ainsi un berger laid, Corydon,est épris d'un bel éphèbe, Alexis, qui dédaigne son amour. Corydon passe par tous les états que peut provoquer une passion non partagée, avant, avec un second degré assumé, décider de passer à autre chose. Virgile résume en une centaine de vers, tous les ressentis et états d'âme d'un amoureux dédaigné.
Dans la Huitième Bucolique, une femme abandonnée par son mari, Alphésibée, tente de le faire revenir par la magie de ses vers, car elle est poète. Et soit la poésie possède vraiment des pouvoirs, ou simple hasard, le volage revient à la maison.
Comme ce bref aperçu le laisse entrapercevoir, ces poèmes sont assez variés dans leurs thématiques, même si la nature, l'amour, et la poésie elle-même (en particulier par les joutes poétiques que pratiquent certains de nos bergers) figurent parmi les thèmes les plus fréquents.
On peut lire l'oeuvre dans son ensemble comme une profession de foi dans la poésie, dans la littérature et l'art en général. le grand talent de Ménalque ne lui permet pas d'échapper à la confiscation de ses biens, ni peut-être à la mort. Mais les deux acolytes qui l'attendent, n'en continuent pas moins à réciter ses vers, même si leurs mémoires se dérobent, deviennent défaillantes. Comme si c'était la seule chose à faire dans la catastrophe, dans ce qu'ils vivent comme la fin du monde, de leur monde tout au moins. Et la seule chose qu'un poète peut faire dans une situation pour ainsi dire désespérée, n'est pas d'essayer d'influer sur les événements, car il n'a pas ce pouvoir. Il serait illusoire de le penser. La seule chose qu'il peut faire, c'est continuer à créer, faire vivre le souvenir, permettre à quelque chose de disparu de persister, faire venir quelque chose qui n'existe pas, et sans doute n'existera jamais. Ne pas essayer de façonner la réalité mais en récréer une dans l'espace poétique. La littérature vaut par elle-même et non pas par une action sur le monde, qui est un mirage.
Mais l'espace imaginaire de l'art est bien plus consistant que ce que créent les hommes de pouvoir : les hommes forts de l'époque de Virgile sont morts, l'Empire romain s'est effondré, et on continue à lire le poète.
Je dois finir ce commentaire par un aveu. Je peux essayer de mettre du sens sur cette poésie, tâcher d'en comprendre quelque chose ( ou de me donner cette illusion), en revanche elle ne m'emporte pas, me reste désespéramment étrangère. Autant les rimes, la musique, les mots de Théocrite, dans la belle traduction de Pierre Versperini, m'ont immédiatement captivée, autant je ne ressent rien devant les mots et la musique de Virgile. D'où la tentative d'essayer de comprendre. Mais lire de la poésie sans une adhésion intuitive est frustrant pour moi ; il me manque quelque chose, peut-être même l'essentiel.
Je ne sais pas si vais réussir un jour à aimer Virgile….
Après avoir découvert récemment, avec un immense plaisir, les Idylles de Théocrite, j'ai voulu poursuivre avec une oeuvre peut-être un peu plus célèbre, qui s'en est inspiré, les Bucoliques de Virgile.
Virgile vécut en des temps troublés, au premier siècle avant notre ère. Époque de persistantes et violentes guerres civiles, en particulier après l'assassinat de Jules César en -44. Et c'est à ce moment de tensions extrêmes, qu'en 42 Virgile écrit les premiers poèmes du cycle, qui en comprend dix. Des histoires de bergers, de troupeaux, d'amour, de disputes, mais aussi de poésie, qui paraissent en décalage total avec la réalité des temps violents pendant lesquels ces textes ont été écrits.
Peut-être pas complètement en décalage quand même : la Première et la Neuvième Bucoliques évoquent la situation critique des personnes expropriées du jour au lendemain, pour que leurs terres soient données aux vétérans des armées vainqueurs. Mélibée, parmi d'autres, doit partir avec son troupeau de chèvres, en train de dépérir en chemin, alors que Tityre, grâce à une rencontre faite à Rome, peut garder son bien et continuer à mener une vie heureuse. Aucun d'une certaine manière ne mérite son sort, qui au final est le fruit d'un hasard, heureux pour l'un, malheureux pour l'autre.
Dans la Neuvième Bucolique, deux hommes marchent, l'un doit amener des bêtes à leur nouveau maître. Ils espèrent l'arrivée d'un certain Ménalque, poète de son état, qui malgré des bruits qui ont couru, et son immense talent, n'a pas été épargné, et a même peut-être été tué. Pour se réconforter, et pour conjurer leurs angoisses, ils récitent de la poésie, celle de Ménalque et la leur.
Dans le quatrième poème, assez mystérieux, et qui a fait couler beaucoup d'encre, est évoquée la naissance d'un enfant miraculeux, qui pourrait faire revenir l'humanité à l'âge d'or. Virgile raconte en passant, l'histoire de l'humanité, telle que se l'imaginait les Romains de l'époque, une histoire sous forme de mythes.
D'autres Bucoliques parlent d'amour, un amour en général à sens unique. Ainsi un berger laid, Corydon,est épris d'un bel éphèbe, Alexis, qui dédaigne son amour. Corydon passe par tous les états que peut provoquer une passion non partagée, avant, avec un second degré assumé, décider de passer à autre chose. Virgile résume en une centaine de vers, tous les ressentis et états d'âme d'un amoureux dédaigné.
Dans la Huitième Bucolique, une femme abandonnée par son mari, Alphésibée, tente de le faire revenir par la magie de ses vers, car elle est poète. Et soit la poésie possède vraiment des pouvoirs, ou simple hasard, le volage revient à la maison.
Comme ce bref aperçu le laisse entrapercevoir, ces poèmes sont assez variés dans leurs thématiques, même si la nature, l'amour, et la poésie elle-même (en particulier par les joutes poétiques que pratiquent certains de nos bergers) figurent parmi les thèmes les plus fréquents.
On peut lire l'oeuvre dans son ensemble comme une profession de foi dans la poésie, dans la littérature et l'art en général. le grand talent de Ménalque ne lui permet pas d'échapper à la confiscation de ses biens, ni peut-être à la mort. Mais les deux acolytes qui l'attendent, n'en continuent pas moins à réciter ses vers, même si leurs mémoires se dérobent, deviennent défaillantes. Comme si c'était la seule chose à faire dans la catastrophe, dans ce qu'ils vivent comme la fin du monde, de leur monde tout au moins. Et la seule chose qu'un poète peut faire dans une situation pour ainsi dire désespérée, n'est pas d'essayer d'influer sur les événements, car il n'a pas ce pouvoir. Il serait illusoire de le penser. La seule chose qu'il peut faire, c'est continuer à créer, faire vivre le souvenir, permettre à quelque chose de disparu de persister, faire venir quelque chose qui n'existe pas, et sans doute n'existera jamais. Ne pas essayer de façonner la réalité mais en récréer une dans l'espace poétique. La littérature vaut par elle-même et non pas par une action sur le monde, qui est un mirage.
Mais l'espace imaginaire de l'art est bien plus consistant que ce que créent les hommes de pouvoir : les hommes forts de l'époque de Virgile sont morts, l'Empire romain s'est effondré, et on continue à lire le poète.
Je dois finir ce commentaire par un aveu. Je peux essayer de mettre du sens sur cette poésie, tâcher d'en comprendre quelque chose ( ou de me donner cette illusion), en revanche elle ne m'emporte pas, me reste désespéramment étrangère. Autant les rimes, la musique, les mots de Théocrite, dans la belle traduction de Pierre Versperini, m'ont immédiatement captivée, autant je ne ressent rien devant les mots et la musique de Virgile. D'où la tentative d'essayer de comprendre. Mais lire de la poésie sans une adhésion intuitive est frustrant pour moi ; il me manque quelque chose, peut-être même l'essentiel.
Je ne sais pas si vais réussir un jour à aimer Virgile….
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Arabella- Messages : 4737
Date d'inscription : 29/11/2016
Re: Virgile
BAM.Je ne sais pas si vais réussir un jour à aimer Virgile….
Mais, tu essayes et tu insistes. Moi, une écriture qui ne m'accroche pas, je laisse tomber. Et comme tu le dis, c'est encore plus radical quand il s'agit de poésie. Il y a quelque chose d'immédiat dans l'adhésion, ou non.
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Et, du monde indistinct des rêves, là où se terrent les secrets mystiques, une réponse surgit.
Queenie- Messages : 6750
Date d'inscription : 29/11/2016
Localisation : *CabanCouette*
Re: Virgile
Oui, mais ce ne sont que dix poèmes, donc malgré tout ça va vite.
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Je ne lis jamais un livre dont je dois écrire la critique ; on se laisse tellement influencer. (Oscar Wilde)
Arabella- Messages : 4737
Date d'inscription : 29/11/2016
Re: Virgile
Énéide
L'illustre épopée latine, écrite par Virgile, sans avoir été achevée, malgré les onze ans passés par l'auteur à son élaboration, et que le poète aurait demander de brûler sur son lit de mort en 19 avant J.-C. L'empereur Auguste, commanditaire, aurait empêché la destruction. La composition de l'oeuvre devenant un mythe en elle-même, ajoutant au mythe raconté dans le poème.
Factuellement, un poème de 12 chants écrits en hexamètres dactyliques, c'est à dire les mêmes vers qu'a utilisés Homère. Ce n'est pas la première tentative d'épopée entreprise par un Romain, mais c'est la seule qu'a retenu la postérité comme la grande épopée romaine. Elle connaît un succès éclatant et immédiat dans le monde romain, qui s'est poursuivi jusqu'à nos jours, avec des vicissitudes inhérentes à la reconnaissance de toute oeuvre littéraire. Suivant les époques, la comparaison avec Homère l'a parfois desservie. Mais il est assez vain de comparer les oeuvres dans l'objectif d'un classement, et sans doute il vaut mieux les considérer en elles-mêmes. Virgile s'est inspiré d'Homère, mais aussi d'autres oeuvres, dont Apollonios de Rhodes (Les Argonautiques, ou l'épopée de Jason parti à la conquête de la Toison d'or). C'est une écriture très consciente d'elle-même, de ce qui l'a précédé, l'Énéide prend place dans toute une tradition littéraire, dont elle entend emprunter le meilleur, avec l'ambition d'être une sorte de synthèse, voire de dépassement.
Au-delà de chanter des mythes fondateurs, l'Énéide se donne aussi l'objectif de faire le lien avec le présent du Virgile. Énée, l'ancêtre fabuleux, a une descendance, et c'est elle qui règne à Rome, en particulier dans la personne d'Auguste, l'empereur. Toute l'histoire romaine à venir est annoncée dans le texte de Virgile, le présent trouve sa justification, sa légitimé, dans le passé, dans la volonté divine, dans le destin. Les Romains seraient issus de Troyens, ils sont donc aussi anciens que les Grecs. Leur domination sur le monde est annoncée, prévue de tout temps.
L' Énéide est généralement considérée comme composée de deux parties. La première ou les six premiers chants, est une sorte d'Odyssée, qui raconte les pérégrinations des Troyens qui ont pu se sauver suite à la prise de leur ville, menés par Énée, à la recherche de la terre qui leur a été promise pour fonder une nouvelle ville, qui sera bien plus puissante que la première. Chassés par tempête provoquée par la haine de Junon, ils ne peuvent accoster en Italie et sont déroutés à Carthage. Énée va y conter à la reine Didon la prise de Troie et les aventures vécues par les survivants. le quatrième chant, peut-être le plus célèbre, évoque les amours de Didon et Énée, jusqu'au départ de ce dernier et la mort de la reine. le sixième chant est le récit de la descente aux Enfers d' Énée, désireux de rencontrer son père Anchise, mort pendant le voyage.
Les six derniers chants sont une sorte d'Iliade, le récit de guerres qu' Énée et les siens doivent mener pour trouver leur place en Italie, terre qui leur est promise, mais qui est déjà occupée par d'autres peuples. Et Junon ne désarme pas : même si elle sait qu'au final Énée va arriver à ses fins, elle tente par tous les moyens de faire durer les choses, d'imposer un maximum de souffrances et de douleurs. Elle déchaîne donc les haines, les violences, et le sang coule à flot. Mais Énée triomphera de tous les obstacles, finira par tuer Turnus, son principal adversaire, et pourra convoler avec une nouvelle épouse, Lavinia, pour donner jour à une lignée qui connaîtra un destin prodigieux, qui mène jusqu'au présent de Virgile.
Ce livre a inspiré un nombre considérable d'artistes (Dante, Berlioz, Turner….) et a donné lieu à des analyses innombrables. Ce que je peux en dire n'aura donc rien de bien original, ni de forcément très intéressant. Mais je tente quand même à me positionner vis-à-vis de cette oeuvre, pour essayer d'être plus au clair avec mes propres ressentis.
Énée, le pieux Énée, comme il est appelé dans le poème est un drôle de héros. Personnage très secondaire de l'Iliade, c'est loin d'être le plus valeureux des guerriers, au point qu'il ne doit son salut qu'au secours de sa mère, Vénus, à deux reprises. En réalité, il ne donne pas forcément le sentiment de vouloir devenir ce qu'il est en train de devenir. Mais comme il est pieux, il obéit au destin qui a été écrit pour lui, de son mieux, en obéissant au quart de tour à tous les ordres divins, en ne critiquant jamais, ne se révoltant pas, malgré tout ce qu'il endure. Il n'est pas très flamboyant en somme, mais efficace et pragmatique, prenant les choses comme elles viennent. Cela donne sans doute de l'humanité au personnage, mais comment dire, cela ne me fait pas trop frémir. Je trouve par ailleurs les autres personnages pas tellement caractérisés non plus pour la plupart, la palme revenant à la malheureuse Lavinia, qui ne prononce pas un seul mot, alors que la guerre fait des ravages entre Énée et Turnus pour savoir que va l'épouser. Évidemment personne ne lui demande son avis dans l'affaire, ce qui est sans doute normale à l'époque, cela dit elle pourrait avoir une opinion ou des sentiments.
Il y a évidemment des passages que j'ai trouvé splendides, comme une partie de la descente aux Enfers, je comprends à quel point tout cela a pu inspirer Dante. Mais j'avoue que cela ne m'emporte pas dans l'ensemble. Ce n'est pas ma première lecture de cette oeuvre, et j'ai bien peur de ne jamais devenir une admiratrice passionnée. Les combats de la deuxième partie, qui tournent à une boucherie sans nom, me sont particulièrement pénibles, d'autant que l'issue étant tellement annoncée d'avance, martelée presque, complètement intégrée par tous les personnages, cela en devient presque gratuit, même s'il y a bien entendu des vers magnifiques, des images qui par moments touchent.
L'illustre épopée latine, écrite par Virgile, sans avoir été achevée, malgré les onze ans passés par l'auteur à son élaboration, et que le poète aurait demander de brûler sur son lit de mort en 19 avant J.-C. L'empereur Auguste, commanditaire, aurait empêché la destruction. La composition de l'oeuvre devenant un mythe en elle-même, ajoutant au mythe raconté dans le poème.
Factuellement, un poème de 12 chants écrits en hexamètres dactyliques, c'est à dire les mêmes vers qu'a utilisés Homère. Ce n'est pas la première tentative d'épopée entreprise par un Romain, mais c'est la seule qu'a retenu la postérité comme la grande épopée romaine. Elle connaît un succès éclatant et immédiat dans le monde romain, qui s'est poursuivi jusqu'à nos jours, avec des vicissitudes inhérentes à la reconnaissance de toute oeuvre littéraire. Suivant les époques, la comparaison avec Homère l'a parfois desservie. Mais il est assez vain de comparer les oeuvres dans l'objectif d'un classement, et sans doute il vaut mieux les considérer en elles-mêmes. Virgile s'est inspiré d'Homère, mais aussi d'autres oeuvres, dont Apollonios de Rhodes (Les Argonautiques, ou l'épopée de Jason parti à la conquête de la Toison d'or). C'est une écriture très consciente d'elle-même, de ce qui l'a précédé, l'Énéide prend place dans toute une tradition littéraire, dont elle entend emprunter le meilleur, avec l'ambition d'être une sorte de synthèse, voire de dépassement.
Au-delà de chanter des mythes fondateurs, l'Énéide se donne aussi l'objectif de faire le lien avec le présent du Virgile. Énée, l'ancêtre fabuleux, a une descendance, et c'est elle qui règne à Rome, en particulier dans la personne d'Auguste, l'empereur. Toute l'histoire romaine à venir est annoncée dans le texte de Virgile, le présent trouve sa justification, sa légitimé, dans le passé, dans la volonté divine, dans le destin. Les Romains seraient issus de Troyens, ils sont donc aussi anciens que les Grecs. Leur domination sur le monde est annoncée, prévue de tout temps.
L' Énéide est généralement considérée comme composée de deux parties. La première ou les six premiers chants, est une sorte d'Odyssée, qui raconte les pérégrinations des Troyens qui ont pu se sauver suite à la prise de leur ville, menés par Énée, à la recherche de la terre qui leur a été promise pour fonder une nouvelle ville, qui sera bien plus puissante que la première. Chassés par tempête provoquée par la haine de Junon, ils ne peuvent accoster en Italie et sont déroutés à Carthage. Énée va y conter à la reine Didon la prise de Troie et les aventures vécues par les survivants. le quatrième chant, peut-être le plus célèbre, évoque les amours de Didon et Énée, jusqu'au départ de ce dernier et la mort de la reine. le sixième chant est le récit de la descente aux Enfers d' Énée, désireux de rencontrer son père Anchise, mort pendant le voyage.
Les six derniers chants sont une sorte d'Iliade, le récit de guerres qu' Énée et les siens doivent mener pour trouver leur place en Italie, terre qui leur est promise, mais qui est déjà occupée par d'autres peuples. Et Junon ne désarme pas : même si elle sait qu'au final Énée va arriver à ses fins, elle tente par tous les moyens de faire durer les choses, d'imposer un maximum de souffrances et de douleurs. Elle déchaîne donc les haines, les violences, et le sang coule à flot. Mais Énée triomphera de tous les obstacles, finira par tuer Turnus, son principal adversaire, et pourra convoler avec une nouvelle épouse, Lavinia, pour donner jour à une lignée qui connaîtra un destin prodigieux, qui mène jusqu'au présent de Virgile.
Ce livre a inspiré un nombre considérable d'artistes (Dante, Berlioz, Turner….) et a donné lieu à des analyses innombrables. Ce que je peux en dire n'aura donc rien de bien original, ni de forcément très intéressant. Mais je tente quand même à me positionner vis-à-vis de cette oeuvre, pour essayer d'être plus au clair avec mes propres ressentis.
Énée, le pieux Énée, comme il est appelé dans le poème est un drôle de héros. Personnage très secondaire de l'Iliade, c'est loin d'être le plus valeureux des guerriers, au point qu'il ne doit son salut qu'au secours de sa mère, Vénus, à deux reprises. En réalité, il ne donne pas forcément le sentiment de vouloir devenir ce qu'il est en train de devenir. Mais comme il est pieux, il obéit au destin qui a été écrit pour lui, de son mieux, en obéissant au quart de tour à tous les ordres divins, en ne critiquant jamais, ne se révoltant pas, malgré tout ce qu'il endure. Il n'est pas très flamboyant en somme, mais efficace et pragmatique, prenant les choses comme elles viennent. Cela donne sans doute de l'humanité au personnage, mais comment dire, cela ne me fait pas trop frémir. Je trouve par ailleurs les autres personnages pas tellement caractérisés non plus pour la plupart, la palme revenant à la malheureuse Lavinia, qui ne prononce pas un seul mot, alors que la guerre fait des ravages entre Énée et Turnus pour savoir que va l'épouser. Évidemment personne ne lui demande son avis dans l'affaire, ce qui est sans doute normale à l'époque, cela dit elle pourrait avoir une opinion ou des sentiments.
Il y a évidemment des passages que j'ai trouvé splendides, comme une partie de la descente aux Enfers, je comprends à quel point tout cela a pu inspirer Dante. Mais j'avoue que cela ne m'emporte pas dans l'ensemble. Ce n'est pas ma première lecture de cette oeuvre, et j'ai bien peur de ne jamais devenir une admiratrice passionnée. Les combats de la deuxième partie, qui tournent à une boucherie sans nom, me sont particulièrement pénibles, d'autant que l'issue étant tellement annoncée d'avance, martelée presque, complètement intégrée par tous les personnages, cela en devient presque gratuit, même s'il y a bien entendu des vers magnifiques, des images qui par moments touchent.
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Je ne lis jamais un livre dont je dois écrire la critique ; on se laisse tellement influencer. (Oscar Wilde)
Arabella- Messages : 4737
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