Dragan Velikić
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Dragan Velikić
Dragan Velikić (1953 - )
Source : Wikipédia
Né à Belgrade, Dragan Velikić passe son enfance à Pula. Il sort diplômé de la Faculté de philologie de l'université de Belgrade. De 1994 à 1999, il est rédacteur en chef de la section éditoriale de Radio B92. Il écrit dans les colonnes du magazine NIN, de Vreme, Danas et Reporter.
En juin 2005, il est nommé ambassadeur de Serbie-et-Monténégro à Vienne puis, en mai 2006, après la déclaration d'indépendance du Monténégro, il continue d'exercer cette fonction en tant qu'ambassadeur de Serbie. Il quitte ce poste après la reconnaissance par l'Autriche de l'indépendance du Kosovo. Puis il redevient ambassadeur en Autriche et reste en poste jusqu'en 2009.
Il est membre de la Société littéraire serbe.
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Je ne lis jamais un livre dont je dois écrire la critique ; on se laisse tellement influencer. (Oscar Wilde)
Arabella- Messages : 4799
Date d'inscription : 29/11/2016
Re: Dragan Velikić
Le Cahier volé à Vinkovci
Un voyage dans le temps, dans l’espace, ou plutôt les espaces, dans la mémoire, mais celle de qui ? De la mère du narrateur (auteur?) qui dans le cahier volé avec d’autres objets, sans doute plus précieux pour les voleurs, notait de manière obsessionnelle les choses, en particulier les hôtels où elle avait séjourné. Et le fils va de la même manière tenter d’arracher à l’oubli, à la disparition définitive, ses propres déplacements, qui dans un premier temps sont les mêmes.
Le père, marin, peu présent, et visiblement même lorsqu’il était là physiquement, n’a pas imprégné de la même manière que la mère, envahissante, angoissée, voulant imposer une manière de vivre, de penser. Toujours présente, malgré sa mort. Présente dans les gestes, les doutes, les obsessions, les souvenirs. Le passé qui est toujours là, qu’il s’agit de traquer, dans les lieux, les objets. Qui peut ressurgir dans une rencontre, une ressemblance. Comme cet ancien camarade de classe qui rend quarante ans après, des tables de logarithmes, inutiles mais essentielles, comme une balise qui marque un lieu sur la carte de la mémoire.
Evidemment les lieux, les décors, les bâtiments, les gens, changent, disparaissent. Mais quelque chose peut toujours surgir, rappeler, faire croire à l’immuable, à une forme d’éternité. Il s’agit de traquer, de ne rien laisser passer, de retenir. Mais la mémoire peut se montrer infidèle, comme celle de la mère atteinte à la fin de sa vie d’Alzheimer. L’oubli de telle personne ou de tel événement en est-il le signe précurseur ? Une angoisse envahit par moments le narrateur.
Mais il est aussi écrivain, romancier, qui invente, qui modifie. Et il tente de reconstituer la vie, les sensations, d’une amie de sa mère, chez qui il a vécu quelques jours, avec la sentiment de toucher au paradis, chez cette femme si différente de sa mère. Les deux cheminements se croisent. C’est que les Balkans sont des lieux qui ont connu des guerres, des changements de frontières, des déplacements de population. La ville de Pula, point central dans l’existence du narrateur, qui n’est plus dans son pays, qui n’est plus son lieu de résidence, qu’il trouvait ennuyeuse, qu’il voulait fuir dans sa jeunesse, est un point de fixation, qu’il ne peut quitter, où il revient à la recherche de lui-même. Dans le même geste, il imagine que Lizeta éprouvait la même chose pour Thessalonique où elle est née, où ses parents sont morts, dont elle a été exfiltrée. Mais le voyage de Lizeta, tel qu’il le raconte, apporte la paix, l’acceptation de soi-même, l’ouverture à tous les possibles, une forme de libération. Cela ne semble pas être le cas des retours à Pula pour le narrateur, qui tournent en rituel sans fin.
Un très beau livre sur la mémoire, sur le lien avec le passé, avec ses proches, mais aussi en filigrane, avec l’Histoire. Car elle est présente à chaque instant, avec ses vicissitudes, ses écueils. Elle modifie les existences, les destins, fixe un champ des possibles à un moment donné, dans lequel chacun essaie de se trouver une place, un interstice, pour tenter de vivre sa petite histoire individuelle. Avant de s’effacer et laisser place à d’autres histoires, qui sont imprégnées de celles qui les ont précédées, qui en gardent trace.
Un voyage dans le temps, dans l’espace, ou plutôt les espaces, dans la mémoire, mais celle de qui ? De la mère du narrateur (auteur?) qui dans le cahier volé avec d’autres objets, sans doute plus précieux pour les voleurs, notait de manière obsessionnelle les choses, en particulier les hôtels où elle avait séjourné. Et le fils va de la même manière tenter d’arracher à l’oubli, à la disparition définitive, ses propres déplacements, qui dans un premier temps sont les mêmes.
Le père, marin, peu présent, et visiblement même lorsqu’il était là physiquement, n’a pas imprégné de la même manière que la mère, envahissante, angoissée, voulant imposer une manière de vivre, de penser. Toujours présente, malgré sa mort. Présente dans les gestes, les doutes, les obsessions, les souvenirs. Le passé qui est toujours là, qu’il s’agit de traquer, dans les lieux, les objets. Qui peut ressurgir dans une rencontre, une ressemblance. Comme cet ancien camarade de classe qui rend quarante ans après, des tables de logarithmes, inutiles mais essentielles, comme une balise qui marque un lieu sur la carte de la mémoire.
Evidemment les lieux, les décors, les bâtiments, les gens, changent, disparaissent. Mais quelque chose peut toujours surgir, rappeler, faire croire à l’immuable, à une forme d’éternité. Il s’agit de traquer, de ne rien laisser passer, de retenir. Mais la mémoire peut se montrer infidèle, comme celle de la mère atteinte à la fin de sa vie d’Alzheimer. L’oubli de telle personne ou de tel événement en est-il le signe précurseur ? Une angoisse envahit par moments le narrateur.
Mais il est aussi écrivain, romancier, qui invente, qui modifie. Et il tente de reconstituer la vie, les sensations, d’une amie de sa mère, chez qui il a vécu quelques jours, avec la sentiment de toucher au paradis, chez cette femme si différente de sa mère. Les deux cheminements se croisent. C’est que les Balkans sont des lieux qui ont connu des guerres, des changements de frontières, des déplacements de population. La ville de Pula, point central dans l’existence du narrateur, qui n’est plus dans son pays, qui n’est plus son lieu de résidence, qu’il trouvait ennuyeuse, qu’il voulait fuir dans sa jeunesse, est un point de fixation, qu’il ne peut quitter, où il revient à la recherche de lui-même. Dans le même geste, il imagine que Lizeta éprouvait la même chose pour Thessalonique où elle est née, où ses parents sont morts, dont elle a été exfiltrée. Mais le voyage de Lizeta, tel qu’il le raconte, apporte la paix, l’acceptation de soi-même, l’ouverture à tous les possibles, une forme de libération. Cela ne semble pas être le cas des retours à Pula pour le narrateur, qui tournent en rituel sans fin.
Un très beau livre sur la mémoire, sur le lien avec le passé, avec ses proches, mais aussi en filigrane, avec l’Histoire. Car elle est présente à chaque instant, avec ses vicissitudes, ses écueils. Elle modifie les existences, les destins, fixe un champ des possibles à un moment donné, dans lequel chacun essaie de se trouver une place, un interstice, pour tenter de vivre sa petite histoire individuelle. Avant de s’effacer et laisser place à d’autres histoires, qui sont imprégnées de celles qui les ont précédées, qui en gardent trace.
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Arabella- Messages : 4799
Date d'inscription : 29/11/2016
Re: Dragan Velikić
Encore un auteur Serbe peu connu (de moi déjà) que nous a dégoté @Arabella, chouette!
Cela m'attire et il est assez court, j'ai vu. Mais j'attends le bon moment, il faut un état d'esprit particulier pour ce retour sur le passé, ce travail sur la mémoire. Je note en tout cas..
Cela m'attire et il est assez court, j'ai vu. Mais j'attends le bon moment, il faut un état d'esprit particulier pour ce retour sur le passé, ce travail sur la mémoire. Je note en tout cas..
Aeriale- Messages : 11830
Date d'inscription : 30/11/2016
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