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Drago Jančar

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Message par Arabella Mar 29 Nov - 20:11

Drago Jančar



Drago Jančar  Drago-11




Il né en 1948 à Maribor, alors partie de la République fédérative socialiste de Yougoslavie. Drago Jančar a étudié le droit dans sa ville natale, et ses écrits dans un journal étudiant, lui valent ses premiers soucis avec les autorités communistes. Il est arrêté en 1974 et condamné à un an de prison. Au bout de trois mois de prison, il est envoyé dans une autre partie du pays pour effectuer son service militaire. 

Ne pouvant plus travailler comme journaliste, il s'emploie dans des studios cinématographiques.

Son premier roman paraît en 1974, le deuxième en 1978, mais c'est la libéralisation intervenue après la mort de Tito en 1980 qui lui permet de déployer toutes ses possibilités littéraires, dans le roman, la nouvelle et aussi le théâtre.

Il est président du Pen Club de Slovénie de 1887 à 1991. Durant la guerre Bosnie-Herzégovine il se rend à Sarajevo assiégé. 

Il reçoit de nombreux prix, dans son pays et à l'étranger, dont en 2011 le prix européen de littérature pour l'ensemble de son oeuvre. 


Livres traduits en français :


- L’Élève de Joyce, traduit par Andrée Lück Gaye, Paris, L'Esprit des Péninsules, 2003 ; réédition, LGF, coll. « Le Livre de poche » no 3445, 2007 

- Aurore boréale, traduit par Andrée Lück Gaye, Paris, L'Esprit des péninsules, 2005 

La Grande Valse brillante, traduit par Andrée Lück-Gaye et Zdenka Štimac, Paris, l'Espace d'un instant, 2007 

Katarina, le paon et le jésuite, traduit par Antonia Bernard, Albi, Passage du Nord-Ouest, 2009 

Des bruits dans la tête, traduit par Andrée Lück Gaye, Albi, Passage du Nord-Ouest, 2011 ; réédition, Phébuscoll. « Libretto » no 502, 2015 

-  Ethiopiques et autres nouvelles, traduit par Andrée Lück-Gaye, Strasbourg, Arfuyen 

- Cette nuit, je l’ai vue, traduit par Andrée Lück Gaye, Paris, Phébus, coll. « Littérature étrangère », 2014 
- Six mois dans la vie de Ciril, traduit par Andrée Lück-Gaye, Paris, Phébus, 2016 
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Message par Arabella Mar 29 Nov - 20:36

L'élève de Joyce


10 nouvelles très courtes, le livre en son entier fait à peine 135 pages. Rien d'inutile dans les récits, on est tout de suite dans l'essentiel, et l'écriture est sobre, dégraissée, sans ornements et surtout sans pathos. Et pourtant les histoires racontées là sont très noires et très dures, il y aurait de quoi faire pleurer sur le destin de ces hommes. Des destins écrasés par l'histoire, par des mouvements d'une ampleur qui dépassent largement les forces d'un homme seul, quelles que soient ses qualités ou sa force. Les choses paraissent jouées d'avance, aucun choix fait par les protagonistes ne pourra rien y changer, l'homme est un fétu de paille. C'est très fort, très dense.

J'ai été aussi plus sensibles à certaines nouvelles, Mort à Sainte-Marie-des-Neige dans lequel l'auteur reprend le personnage, ou un personnage très proche, du personnage principal du roman de Boulgakov, La garde blanche, en imaginant son futur. Un futur qui semble encore plus sombre que les événements imaginés par Boulgakov. 

Et puis Image de Castille, dans un cadre historique et géographique différent, dans lequel c'est Dieu lui-même qui semble se moquer des hommes, de leurs vertus et bonne volonté.

Une lecture qui m'a vraiment touchée, et qui me donne très envie de découvrir les romans de l'auteur, dont certains sont disponibles en Français.
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Message par Arabella Mar 29 Nov - 20:39

Aurore boréale



Un homme d'affaires autrichien, Josef Erdmann, vient dans la ville de Maribor, pour y rencontrer son associé avant de faire avec lui un tour de ses clients de la région. Il a choisi ce point de rencontre, car sa famille a vécu dans cette ville, et d'anciens souvenirs liés à l'endroit le hantent. Mais l'associé ne vient pas comme prévu, malgré les télégrammes envoyés, et une étrange transformation se produit chez Josef, à laquelle la ville et ses habitants, ne sont pas étrangers. D'autant plus que la situation est trouble dans cette ville slovène, nous sommes en 1938 et l'histoire est en marche. Une aurore boréale semble annoncer les transformations à venir, dans la vie de Josef, comme dans celle de ce coin du monde en général.

Un livre étrange, entre rêve et réalité. Nous suivons à la fois Josef, une partie du récit est d'ailleurs à la première personne, mais aussi les personnes qu'il croise dans son séjour à Maribor, le destin de certains d'entre eux, dans les quelques années à venir, qui seront des années tragiques, nous est parfois révélé, en quelques paragraphes ou pages, sobres, et du coup très fortes. Nous entrevoyons ainsi les événements liés à la guerre, nazisme, communisme, nationalismes divers, par le prisme de destinées individuelles, présentées d'une façon concise, sans pathos, mais pas pour autant sans émotion. Mais une émotion retenue, ne cherchant pas l'effet facile ni l'apitoiement. Et en parallèle l'errance de Josef, fasciné, comme hypnotisé par cette ville qu'il n'arrive pas à quitter, alors que finalement il n'a rien à y faire. Un récit onirique, loin des lois du monde rationnel, qui elles s'appliquent aux autres personnages dont nous croisons le chemin. Un récit un peu à la manière de Musil, ou Thomas Mann dans La montagne magique, sans vouloir écraser Drago Jancar sous les comparaisons.

Un livre étonnant, dense et très fort par moments, même si j'ai trouvé que cela se délitait un peu vers la fin et que l'auteur n'arrivait pas à donner un fin digne des promesses qu'il avait fait naître dans la première partie de son récit. Mais un auteur que je trouve décidément intéressant à suivre.
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Message par Arabella Mar 29 Nov - 20:42

Katarina, le paon et le jésuite



Nous sommes vers 1756, juste avant le déclanchement de la guerre de 7 ans en Slovénie. Et c’est le moment que choisi Katarina, fille d’un régisseur d’un vaste domaine pour partir en pèlerinage à Cologne. Pour échapper aux désirs inassouvis, et à un amour dont elle comprend pourtant toute la vanité pour un neveu du propriétaire du domaine, le capitaine Windisch, prétentieux et imbu de lui-même. Son chemin va croiser celui de Simon, un ex-jésuite, de retour du Paraguay, où les réductions peuplées de Guarani sont en train de sombrer sous la violence des colons européens, avec l’accord de la hiérarchie de l’église catholique. Dans un monde qui sombre dans la violence, et dans lequel les lumières du XVIIIem siècle n’ont pas fait disparaître les croyances et les superstitions du Moyen-âge, les destins de ces trois personnages vont s’entrelacer.

Baroque, touffu et romanesque, voilà un roman historique d’une grande densité. L’auteur saisi un moment de transition et de bouleversements, et dépeint deux personnages épris d’absolu et en quête d’eux-mêmes, Katarina et Simon. Le personnage de Katarina est au centre, flamboyant, tragique par moments, mais d’une grande force et d’une résistance et consistance étonnante. Il illumine tout le roman, qui malgré toute la violence et tristesse qu’il contient ne sombre jamais dans le désespoir et l’attrait du vide. 


Un beau portrait de femme, un tableau frappant d’une époque troublée, un récit prenant, associé à un texte d’une grande exigence littéraire ; une très belle lecture. 
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Message par Arabella Mar 29 Nov - 20:45

Des bruits dans la tête


Deux prisonniers. L’un raconte. L’autre note. Le deuxième n’est qu’une ombre, une plume. Le premier est une légende, il s’appelle Keber. Un baroudeur, béret vert. Auteur d’un vol à mains armées. Mais surtout l’instigateur mythique du soulèvement de la prison de Livada, pendant lequel, les détenus avaient pris et gardé un bon moment le contrôle de toute la prison, encerclés par la police et l’armée. Nous suivons donc les événements de cette révolte, son histoire au jour le jour. Mais Keber raconte aussi d’autres événements de sa vie, tout ce qui l’a amené en prison, des bribes de son enfance, ses amours. Et son obsession depuis des années, la fameuse grande révolte des Juifs, et l’un de ses épisodes fameux, le siège et la prise de Massada. Un parallèle de plus en plus fort se dessine entre les événements de Livada et de Massada. 

Quel livre. D’une grande richesse et complexité, plus que difficile à résumer, sans doute impossible. Plusieurs thèmes s’entrecroisent, plusieurs motifs et modes narratifs. Un côté suspens d’une grande efficacité, en ce qui concerne le déroulement de la prise de pouvoir par les détenus, et ensuite de leur encerclement, des négociations, de l’attente de l’assaut… Le fonctionnement du pouvoir, en prison comme un microcosme de la société en général. Terrifiant, sans doute parce que d’une justesse chirurgicale. Le goût du pouvoir, la façon dont il transforme les hommes faisant ressortir leurs aspects les plus sombres, la cruauté, la façon dont les forts dominent les plus faibles, l’incapacité de la masse silencieuse à s’organiser et de s’opposer à ses bourreaux. Mais en même temps tous les bruits dans la tête du narrateur, ses amours, ses élans, ses espoirs et rêves. Même si les rapports entre les hommes et les femmes sont plus que difficiles, à la limite de l’impossible. Et le très grand talent de l’auteur, est de faire de ce livre qui pourrait n’être que glaçant et implacable, quelque chose de poétique, et où l’espoir n’est pas absent. Une gageure, tenue de bout en bout, au plus grand plaisir du lecteur. A découvrir absolument. 
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Message par Arabella Mar 29 Nov - 20:48

Cette nuit, je l’ai vue

Celle qui a été vue, c’est Veronika, une jeune femme brillante qui fascine tous ceux qui l’approchent. Et cinq personnes parlent d’elle, des souvenirs, de traces qu’elle leur a laissées avant de disparaître mystérieusement en 1944 en pleine guerre avec son mari…Petit à petit, par les souvenirs de ceux qui l’ont côtoyée, nous apprendrons un peu mieux qui elle était et quel fut son destin….En même temps, les personnes qui parlent se dévoilent, leurs choix, leurs vies, leurs fatalités se dessinent, ainsi que celle des époques pendant lesquelles leurs vies ont tracé leurs sillons. 

Ce roman semble de prime abord simple, un tel ou un tel parle, se raconte et parle de Veronika, qui a été capitale, d’une façon ou d’une autre pour lui. Drago Jančar capte la personnalité et les particularités de chacun, avec son langage, ses points de vue, ses présupposés. Son déterminisme ou son destin. Mais à partir d’un moment, au-delà du portrait particulier de tel ou tel, c’est la nature humaine d’une façon beaucoup plus générale que l’auteur cherche à révéler. Et sa vision est d’une très grande noirceur. Et ce qui est peut être le plus terrifiant, c’est qu’en partant des portraits de personnages en somme sympathiques, dont on comprend les positions, il en arrive à évoquer les côtés les plus sombres et terribles des comportements humains. A quel point nous sommes tous déterminés par l’environnement, le groupe, un contexte. La bonne foi et la bonne volonté ne suffisent pas pour se dégager de ces engrenages. 

C’est un livre très différent en apparence de son précédent roman « Des bruits dans la tête », ce dernier était métaphorique, presque abstrait dans son analyse de la violence, de la domination, des rapports de force, du fonctionnement de groupes. Là, nous sommes dans une histoire très concrète, avec des personnes sensibles, qu’on imagine très bien, dont la psychologie est parfaitement dessinée et crédible. Clairement situées dans le temps et dans l'espace. Mais au final, à travers ces histoires individuelles, c’est les mêmes mécanismes que l’auteur met en évidence. Et cela donne un livre bouleversant et difficile à oublier. Très beau et terrible. Qui m’a marquée pour très longtemps. Sans doute mon livre de l’année. 
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Message par Arabella Mar 29 Nov - 20:54

Six mois dans la vie de Ciril


Un jeune Slovène joue du Mozart dans le métro à Vienne. Un compatriote s’arrête, et emmène je le jeune homme dans une virée, puis lui propose de le ramener en Slovénie et lui offrir une situation plus intéressante que violoniste sans revenus fixes. Ciril se laisse emmener, puis les événements s’enchaînent, sans qu’il y comprenne grand-chose, puis en comprenant de mieux en mieux, sans avoir la force de résister au courant. Le retour au pays fait remonter son passé, son histoire.

Il ne s’agir pas d’un récit vraiment réaliste, ni psychologique réellement, plutôt d’une fable, d’une métaphore, même si certaines descriptions sont très précises, et les personnages saisis parfois avec beaucoup de justesse. Cela peut être frustrant par moments, parce que l’extrême passivité de Ciril, n’est pas vraisemblable, et fait qu’on s’attache moins à ce personnage. Mais je crois que c’est le parti pris de Drago Jančar, il pousse le procédé jusqu’au bout, pour aller jusqu’au bout d’une démonstration.

C’est le constat de l’état d’une société, certes celle de la Slovénie après le communisme, mais aussi quelque part celle de l’Europe et d’une bonne partie du monde. Les mécanismes en jeu sont peut être plus visibles, plus directs, mais pas très différents, de ce qui se passe ailleurs, et d’une certaine façon précurseurs d’une direction générale, dans laquelle une réussite matérielle à n’importe quelle prix est la seule valeur qui reste, la seule légitime.

Le livre est prenant, avec une écriture par petites touches, par petites phrases, un peu à l’extérieur, sauf quelques parties un peu plus lyriques, avec des enchaînements d’événements sans failles, dans lesquelles nous sommes entraînés comme le héros, sans répit.

Moins original et fort à mon sens que Des bruits dans la tête ou Cette nuit je l’ai vue, mais quand même intense.
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Message par darkanny Mer 30 Nov - 8:10

C'est le prochain auteur que je tente, depuis que je vois vos post sur lui, je suis curieuse de découvrir.
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Message par Arabella Mer 30 Nov - 8:40

Je ne peux que t'encourager, Darkanny, bien évidemment.

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Message par domreader Ven 2 Déc - 19:21

darkanny a écrit:C'est le prochain auteur que je tente, depuis que je vois vos post sur lui, je suis curieuse de découvrir.

Moi aussi, pareil.... à tenter d'urgence.
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Message par Arabella Ven 2 Déc - 19:35

Cela fait plaisir.

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Message par Aeriale Mer 14 Déc - 13:58

-Cette nuit je l'ai vue-


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    Quand je suis seul, parfois j'ouvre un livre, je me verse un verre de vin et je m'assois parmi mes camarades qui sont sur le mur, j'écoute les chants de partisans que j'ai enregistrés et ça me fait du bien et du mal, les deux en même temps. C'est ce que mon fils ne comprendra jamais, que ça me fait du bien et du mal, les deux en même temps.



On est en 1945. Stevo, commandant de cavalerie de l'armée royale yougoslave en déroute, a une vision: celle de Veronika, femme belle et fascinante dont il fut l'amant sept ans auparavant, et qui le quitta un jour pour rejoindre son mari resté dans leur manoir en Slovénie. Il n'en finit pas de regretter...qu'est-elle devenue? Résonne ensuite la voix de la mère, qui l'attend toujours et parle à son mari mort depuis longtemps. "Si elle était restée avec Stevo, notre fille serait toujours à Moribor". Elle aussi est rongée par les souvenirs du bonheur qui n'est plus et les remords qui s'y rattachent. C'est elle qui l'a convaincue de rentrer. Puis le Dr Horst, militaire allemand et ami du couple, habituel invité aux soirées mondaines organisées dans leur domaine, pour parer à la guerre et s'étourdir d'insouciance. Enfin la voix de deux employés, la fidèle gouvernante Jozi, et  Jeranek, le palefrenier secrètement amoureux de sa patronne. Chacun va ainsi avouer sa part de responsabilité, reconnaître sa culpabilité, et peu à peu l'intrigue va se dénouer..

Une fresque tragique, que l'auteur reconstruit à partir de ces témoignages, chacun apportant sa vision des choses, tempérée ou explicitée par la suivante, et au travers desquelles Veronika n'en finit pas de changer. Libre, désinvolte, contrainte ou innocente, elle représente un peu cet aspect troublé d'une Yougoslavie disparue que Drago Jancar nous évoque parallèlement.

C'est un très beau roman, avec des accents terriblement nostalgiques, qui prend de plus en plus de force à mesure que l'on avance. J'ai adoré suivre les pas de cette héroïne qui nous reste pourtant assez floue, ce qui à mon goût renforce l'image sous-jacente. Comme son royaume, Veronika demeure mystérieuse, tour à tour convoitée et victime des tensions qu'elle provoque. Arabella souligne la noirceur de ce texte et je la rejoins. La liberté a un prix, elle semble un mirage au milieu du chaos, ici elle finit désarticulée au fond d'un trou, tout comme son personnage, semble nous dire Drago Jancar. Superbe, merci Arabella!

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Message par Aeriale Lun 19 Juin - 18:46

-Six mois dans la vie de Ciril-

Drago Jančar  Index101

@Arabella l'a déjà bien présenté, le parcours d'un jeune violoniste talentueux mais cossard et bohème, embarqué malgré lui dans les affaires louches d'un providentiel bienfaiteur, slovène comme lui, et rencontré à Vienne dans les couloirs du métro, qui lui promet la réussite à Ljubljana.

On suit sans déplaisir les pérégrinations amusantes de ce naïf qui ne comprend pas grand chose aux affaires plutôt opaques se tramant autour de lui et qui finit par être pris en charge par son protecteur Dobernick moyennant quelques menus services. Bien sûr, la crédulité et surtout l'extrême passivité de Ciril ballotté entre femmes et évènements obscurs sont difficiles à admettre, mais elle ne m'ont pas dérangée, dans le sens où Ciril est le reflet d'une jeunesse un peu déboussolée, coincée entre ses rêves de grandeur et la difficulté, voire la compromission, par lesquelles elle doit parfois passer pour y arriver.

Comme le dit Arabella, j'ai vu ce roman davantage comme une metaphore, le constat désabusé même si bienveillant, sans acrimonie en tout cas, de cette génération qui s'est réveillée sur une liberté nouvelle et enivrante mais n'a pas su la gérer. Ciril empêtré dans ses fameux principes hérités du père, et tiraillé par sa bonne conscience, sait qu'il joue avec le feu mais est incapable de réagir. C'est ce décalage, cette inadaptation au monde actuel que Jancar met en exergue comme il l'expliquait lors de la présentation de son roman, à la rentrée de septembre.

Dans les années 80 nous rêvions de démocratie, et nous nous sommes réveillés avec le capitalisme, mais une vision cruelle du capitalisme.

Un joli roman qui parle de valeurs qu'on a perdues et de liberté chère à trouver. J'ai bien aimé, même si très différent de Cette nuit je l'ai vue :-)
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Message par Arabella Mer 1 Nov - 13:28

La grande valse brillante

Cette pièce a été jouée pour la première fois en 1985. Un petit peu d'histoire, même si elle est récente. Tito est mort, mais la Yougoslavie n'a pas encore éclaté (la Slovénie, la patrie de l'auteur sera indépendante en 1991). 1985 marque aussi l'arrivée au pouvoir d'un certain Mikhaïl Gorbatchev, qui va impulser par la suite les changements que l'on sait. Mais avant l'éclatement de l'Europe sous domination soviétique, les débuts des années 80 du siècle dernier sont marqués par les événements de Pologne : Solidarnośċ, les accords de Gdańsk, l'état de siège, avant les accords de la Table ronde de 1986, qui aboutiront au premier gouvernement non communiste dans un pays de l'Europe de l'Est. Je crois qu'il est important d'avoir ces éléments en mémoire pour mieux appréhender la pièce de Drago Jančar.

Simon Veber, le personnage principal de la pièce, est un historien, ses derniers travaux portent sur un certain Drohojowski, un insurgé polonais de le révolution de 1830, qui après bien des vicissitudes, est venu mourir en Slovénie. Mais les choses se présentent mal pour Simon, suite à une nuit de cuite, il se réveille dans un hôpital psychiatrique. D'après sa femme Klara, fille d'un membre important du parti, ce n'est que pour un mois, le temps qu'il soigne ses excès divers. D'étranges patients habitent l'hôpital, des artistes pour nombre d'entre eux. le pouvoir dans le lieu glisse de plus en plus dans les mains de Volodia, dit la Nuque, un infirmier brutal, qui terrorise les pensionnaires, et qui prend progressivement complètement l'ascendant sur le Docteur, censé être le directeur. Volodia se montre de plus en plus sadique et manipulateur, Simon tente de lui résister.

Une pièce très forte. Au-delà de la métaphore du pouvoir communiste, la pièce s'attache à démonter toute sorte d'emprise sur les âmes. Volodia arrive à imposer sa domination, sa force brute, sa folie, parce que le monde dans lequel se passe la pièce est en quelque sorte fou, vit sur le mensonge, sur un faux-semblant. Dans le clair-obscur des vérités incertaines, à force de ruser avec le(s) pouvoir(s), à tenir des discours ambigus, les personnages perdent la notion de leur identité, leur capacité à distinguer l'inacceptable et à s'y opposer. La plongée dans la folie et dans une identité de substitution peut apparaître comme une échappatoire ironique. Mais ne fait qu'accélérer la déliquescence générale.

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Message par Queenie Jeu 2 Nov - 9:12

ça a l'air costaud!

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