Gouzel Iakhina
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Re: Gouzel Iakhina
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Queenie- Messages : 6727
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Nightingale- Messages : 2432
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Re: Gouzel Iakhina
Et pas censurée par Poutine ?
Étonnant, non ?
Parce qu'au fond, ça rappelle et critique, en projection, ses méthodes actuelles.
Étonnant, non ?
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Queenie- Messages : 6727
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Re: Gouzel Iakhina
Je m'étais fait la même réflexion....
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Je ne lis jamais un livre dont je dois écrire la critique ; on se laisse tellement influencer. (Oscar Wilde)
Arabella- Messages : 4732
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Re: Gouzel Iakhina
Queenie a écrit:Et pas censurée par Poutine ?
Étonnant, non ?
Parce qu'au fond, ça rappelle et critique, en projection, ses méthodes actuelles.
Arabella a écrit:Je m'étais fait la même réflexion....
J'ai lu un article sur Télérama au sujet de la série.
La série a fait une très bonne audience, qui a provoqué « une avalanche de critiques ».
A commencer par la République du Tatarstan, république de Russie à dominante musulmane, dénonçant l'image des Tatrs donnée par la série. L’Assemblée spirituelle des musulmans de Russie a exigé de la chaîne des excuses.
Extraits de Télérama :
À la tête du comité parlementaire en charge de la société civile, le député Sergueï Gavrilov en a profité pour demander au parquet général et au ministère de la Culture de vérifier si la série ne se rendait pas coupable « d’offense aux convictions religieuses ».
Depuis son adoption en 2013, cette loi est régulièrement brandie par des organisations afin de légitimer la censure. « Nous n’avons pas besoin de films qui divisent la société et incitent à la haine religieuse », a justifié le zélé Gavrilov, appelant à réserver les subventions publiques aux « œuvres patriotiques ».
Une petite musique qui, depuis la fièvre criméenne de 2014, s’est peu à peu imposée comme idéologie d’État. Le passé national, a fortiori soviétique, ne saurait dorénavant être présenté sous un jour autre que glorieux. Racontant l’horreur de la dékoulakisation, Zouleikha a suscité des critiques pavloviennes des communistes, accusant la série de falsifier l’histoire. « Énormément de personnes en Russie sont fatiguées de cet antisoviétisme primaire perçu à juste titre comme de la russophobie ! », a renchéri l’écrivain Zakhar Prilepine dans le journal Vzgliad.
Membre de l’organisation Memorial, l’historienne Irina Chtcherbakova attribue cette fièvre à la ligne idéologique adoptée par le Kremlin. « La justification du pouvoir soviétique et la défense de Staline ont pris une ampleur qui paraissait autrefois impensable, analyse-t-elle. Les Russes ne croient pas en l’avenir et ressentent le besoin de se raccrocher à quelque chose. L’idée selon laquelle le passé a pu être à ce point terrible leur est difficilement supportable. »
Il semble pourtant que l'adaptation soit assez soft, prenant un parti pris plutôt romanesque, privilégiant le parcours de l’héroïne Zouleikha.
Extraits de Télérama :
Ce déferlement de commentaires négatifs est d’autant plus frappant que cette adaptation télévisée se montre bien précautionneuse dans son tableau de l’époque. « Nous nous sommes souvent dit que nous n’allions pas assez loin, qu’il fallait peut-être montrer les choses de façon plus crue. Mais entre un film d’auteur et une fiction destinée au large public, la marge de manœuvre n’est pas la même », admet le réalisateur Egor Anachkine, qui souligne avoir privilégié la trajectoire personnelle de l’héroïne, « les épreuves qu’elle traverse, l’amour qu’elle porte à son fils ». Un parti pris romanesque que ne renie pas Gouzel Iakhina, l’écrivaine dont la propre histoire familiale a inspiré l’œuvre : « Le nombre de victimes de la dékoulakisation a été prononcé sur une chaîne publique à une heure de grande écoute. C’est sans doute le plus important. »
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Nightingale- Messages : 2432
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Re: Gouzel Iakhina
Zouleikha ouvre les yeux
Le roman se passe en Union Soviétique dans les années trente, et plus précisément au Tatarstan. Le personnage titre est une jeune femme, mariée à un homme beaucoup plus âgé, terrorisée par sa belle mère. Nous sommes en pleine « dékoulakisation » et les paysans aisés, comme le mari de Zouleikha, sont en point de mire des autorités. Il est assassiné par le chef d’un détachement de l’Armée Rouge, et Zouleikha est déportée en Sibérie avec d’autres paysans, ainsi que des citadins « bourgeois ». Beaucoup meurent en route, et les difficultés continuent une fois sur place, où il s’agit de survivre et d’installer un village pour ainsi dire dans le désert, dans un climat éprouvant et pratiquement sans outillage et équipement dans un premier temps. Zouleikha réussira à subsister, à donner naissance à un fils, et à se trouver une nouvelle place, parmi ses compagnons d’infortune.
C’est incontestablement un très bon roman, très bien construit. Il procède par scènes, par moments forts, d’une manière quelque peu cinématographique, plus que par des analyses introspectives. L’auteure a su créer des personnages attachants, et à dépeindre du point de vue de leur vécu les processus historiques en arrière plan. Les quelques aspects de la culture tatare présents dans le livre sont intéressants, comme la croyance aux esprits.
Je suis toutefois moins enthousiaste qu’un certain nombre d’autres lecteurs. Peut-être parce que j’ai lu pas mal de livres qui évoquent cette période et les déportations et camps : Soljenitsyne, Chalamov, Herling-Grudzinski etc . Gouzel Iakhina n’est pas vraiment dans la même catégorie, c’est plus romanesque, moins puissant, que ce soit dans l’écriture que dans la vision de l’humanité que le livre sous-tend. Le roman a le grand mérite d’évoquer ces moments difficiles d’une manière sans doute plus accessible à un plus grand nombre de lecteurs que les chefs d’oeuvres des très grands écrivains que j’ai cités précédemment, et cela à un moment où ce passé douloureux a tendance a être nié en Russie, où une réécriture de l’histoire se met en branle. Il décrit également tout cela du point de vue de petites gens, qui ne sont pas des artistes ou opposants politiques, des personnalités d’exception, ce qui donne une approche différente. On gagne en empathie, même si forcément on perd en analyse.
Le roman se passe en Union Soviétique dans les années trente, et plus précisément au Tatarstan. Le personnage titre est une jeune femme, mariée à un homme beaucoup plus âgé, terrorisée par sa belle mère. Nous sommes en pleine « dékoulakisation » et les paysans aisés, comme le mari de Zouleikha, sont en point de mire des autorités. Il est assassiné par le chef d’un détachement de l’Armée Rouge, et Zouleikha est déportée en Sibérie avec d’autres paysans, ainsi que des citadins « bourgeois ». Beaucoup meurent en route, et les difficultés continuent une fois sur place, où il s’agit de survivre et d’installer un village pour ainsi dire dans le désert, dans un climat éprouvant et pratiquement sans outillage et équipement dans un premier temps. Zouleikha réussira à subsister, à donner naissance à un fils, et à se trouver une nouvelle place, parmi ses compagnons d’infortune.
C’est incontestablement un très bon roman, très bien construit. Il procède par scènes, par moments forts, d’une manière quelque peu cinématographique, plus que par des analyses introspectives. L’auteure a su créer des personnages attachants, et à dépeindre du point de vue de leur vécu les processus historiques en arrière plan. Les quelques aspects de la culture tatare présents dans le livre sont intéressants, comme la croyance aux esprits.
Je suis toutefois moins enthousiaste qu’un certain nombre d’autres lecteurs. Peut-être parce que j’ai lu pas mal de livres qui évoquent cette période et les déportations et camps : Soljenitsyne, Chalamov, Herling-Grudzinski etc . Gouzel Iakhina n’est pas vraiment dans la même catégorie, c’est plus romanesque, moins puissant, que ce soit dans l’écriture que dans la vision de l’humanité que le livre sous-tend. Le roman a le grand mérite d’évoquer ces moments difficiles d’une manière sans doute plus accessible à un plus grand nombre de lecteurs que les chefs d’oeuvres des très grands écrivains que j’ai cités précédemment, et cela à un moment où ce passé douloureux a tendance a être nié en Russie, où une réécriture de l’histoire se met en branle. Il décrit également tout cela du point de vue de petites gens, qui ne sont pas des artistes ou opposants politiques, des personnalités d’exception, ce qui donne une approche différente. On gagne en empathie, même si forcément on perd en analyse.
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Arabella- Messages : 4732
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Re: Gouzel Iakhina
Tout à fait d'accord.Arabella a écrit:
C’est incontestablement un très bon roman, très bien construit. Il procède par scènes, par moments forts, d’une manière quelque peu cinématographique, plus que par des analyses introspectives. L’auteure a su créer des personnages attachants, et à dépeindre du point de vue de leur vécu les processus historiques en arrière plan. Les quelques aspects de la culture tatare présents dans le livre sont intéressants, comme la croyance aux esprits.
Pour la suite de ton analyse, je n'ai pas la connaissance littéraire que tu as en la matière, et je suis persuadé que tu as tout à fait raison.
Sans doute ce roman est-il une bonne approche pour cette période de l'histoire, effectivement très accessible à tous, et peut nous encourager à aller voir plus loin, vers des lectures plus fouillées et du coup moins romanesques.
Comme tu le dis très bien :
On gagne en empathie, même si forcément on perd en analyse.
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Nightingale- Messages : 2432
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Re: Gouzel Iakhina
-Zouleikha ouvre les yeux-
Le récit se situe donc en 1930. L'héroïne, une petite paysanne Tatare, mariée très jeune a un homme de plus de 20 ans son ainé, vit dans l'ombre de celui ci et de sa belle mère, vieille et acariâtre, qui tous deux la terrorisent. Mais Zouleikha est soumise, son éducation et ses croyances l'empêchent de se rebeller. Sa seule infraction est de subtiliser, le soir venu, quelques morceaux de sucre dans la pièce de l'isba où dort la vieille "Goule" pour l'offrir aux divinités. Tout va être bouleversé le jour où un bataillon de la Horde Rouge chargé de soumettre les paysans rétifs à la collectivisation, tombe sur Zouleikha et son mari partis cacher des semences dans la forêt.
Gouzel Iakhina nous entraîne dès lors dans une terrible épopée où de pauvres hères déportés sans autre forme de procès vont se retrouver, toutes religions et statuts confondus, transbahutés puis abandonnés au fin fond de la Sibérie, sur les bords de l'Angora. Ils vont y connaître l'exil, la faim, la souffrance et la désolation. Pourtant au coeur de cet enfer qu'elle nous décrit sans fausse pudeur, où bourreaux et victimes s'interfèrent, où les repères changent et les lois s'improvisent, la cruauté et la perfidie s'y repaissant, des personnages vont par delà l'horreur trouver une voie nouvelle, un sens à leur vie, parfois une humanité ignorée illuminant tout le texte.
Bien sûr Zouleikha la première, humble et fragile, qui s'ouvre au monde, affronte ses peurs pour enfin décider de ses actes, touche d'emblée. Mais le plus frappant, je trouve aussi, est l'impressionnant Ignatov, militaire dévoué à son régime, intransigeant, emmuré dans ses principes, qui dévoile ici un portait tout en complexité et finesse. Toute une galerie de personnages nous est ainsi dépeinte, du peintre au professeur Liebe (en passant par l'odieux Gorelov) donnant à ce roman une authenticité particulière, davantage romanesque comme le dit Arabella, mais très lumineuse et emplie d'espoir en l'homme. S'échapper de la barbarie et renaître, c'est cet étonnant transfert que nous propose l'auteure et elle y parvient magnifiquement. Merci à vous @Queenie et @Nightingale pour l'idée, j'ai adoré!
Le récit se situe donc en 1930. L'héroïne, une petite paysanne Tatare, mariée très jeune a un homme de plus de 20 ans son ainé, vit dans l'ombre de celui ci et de sa belle mère, vieille et acariâtre, qui tous deux la terrorisent. Mais Zouleikha est soumise, son éducation et ses croyances l'empêchent de se rebeller. Sa seule infraction est de subtiliser, le soir venu, quelques morceaux de sucre dans la pièce de l'isba où dort la vieille "Goule" pour l'offrir aux divinités. Tout va être bouleversé le jour où un bataillon de la Horde Rouge chargé de soumettre les paysans rétifs à la collectivisation, tombe sur Zouleikha et son mari partis cacher des semences dans la forêt.
Gouzel Iakhina nous entraîne dès lors dans une terrible épopée où de pauvres hères déportés sans autre forme de procès vont se retrouver, toutes religions et statuts confondus, transbahutés puis abandonnés au fin fond de la Sibérie, sur les bords de l'Angora. Ils vont y connaître l'exil, la faim, la souffrance et la désolation. Pourtant au coeur de cet enfer qu'elle nous décrit sans fausse pudeur, où bourreaux et victimes s'interfèrent, où les repères changent et les lois s'improvisent, la cruauté et la perfidie s'y repaissant, des personnages vont par delà l'horreur trouver une voie nouvelle, un sens à leur vie, parfois une humanité ignorée illuminant tout le texte.
Bien sûr Zouleikha la première, humble et fragile, qui s'ouvre au monde, affronte ses peurs pour enfin décider de ses actes, touche d'emblée. Mais le plus frappant, je trouve aussi, est l'impressionnant Ignatov, militaire dévoué à son régime, intransigeant, emmuré dans ses principes, qui dévoile ici un portait tout en complexité et finesse. Toute une galerie de personnages nous est ainsi dépeinte, du peintre au professeur Liebe (en passant par l'odieux Gorelov) donnant à ce roman une authenticité particulière, davantage romanesque comme le dit Arabella, mais très lumineuse et emplie d'espoir en l'homme. S'échapper de la barbarie et renaître, c'est cet étonnant transfert que nous propose l'auteure et elle y parvient magnifiquement. Merci à vous @Queenie et @Nightingale pour l'idée, j'ai adoré!
Aeriale- Messages : 10735
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Re: Gouzel Iakhina
Je vois que vous êtes unanimes !
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'La littérature est une maladie textuellement transmissible, que l'on contracte en général pendant l'enfance'. Jane Yolen.
domreader- Messages : 3195
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Re: Gouzel Iakhina
J’ai bien fait de l’acheter alors 

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Liseron- Messages : 3908
Date d'inscription : 02/01/2017
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Re: Gouzel Iakhina
Très belle critique d'Aeriale.
On ne remerciera jamais assez notre grande Queenie pour avoir déniché ce roman !
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Nightingale- Messages : 2432
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Re: Gouzel Iakhina
Oui sans hésiter, tu peux y aller, Liseron!Liseron a écrit:J’ai bien fait de l’acheter alors
Eh oui, c’est @Queenie la première qui nous a dégoté cette petite merveille, toi tu as réactivé le fil et ça aurait été dommage de passer à côté, @Nightingale ;-)
Aeriale- Messages : 10735
Date d'inscription : 30/11/2016
Re: Gouzel Iakhina
On a même chopé @arabella !domreader a écrit:Je vois que vous êtes unanimes !
Tutafé.Liseron a écrit:J’ai bien fait de l’acheter alors
Petit malinNightingale a écrit:Très belle critique d'Aeriale.
On ne remerciera jamais assez notre grande Queenie pour avoir déniché ce roman !
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Queenie- Messages : 6727
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Re: Gouzel Iakhina
Queenie a écrit:Petit malinNightingale a écrit:Très belle critique d'Aeriale.
On ne remerciera jamais assez notre grande Queenie pour avoir déniché ce roman !

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Nightingale- Messages : 2432
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Re: Gouzel Iakhina
J’ai enfin trouvé ma petite héroïne pour illustrer la journée de la femme dans le petit mensuel du mois de mars dont je vous parlais...
C’est bien sûr « Zouleikha ouvre les yeux » forte et vaillante à la fin du livre.. Un roman à faire connaître autour de soi
C’est bien sûr « Zouleikha ouvre les yeux » forte et vaillante à la fin du livre.. Un roman à faire connaître autour de soi

Aeriale- Messages : 10735
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