Mario Levrero
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Mario Levrero
Mario Levrero (1940-2004)
Jorge Mario Varlotta Levrero, né à Montevideo le 23 janvier 1940 et mort dans la même ville le 30 août 2004, il a vécu à Buenos Aires, Rosario et Bordeaux.
Levrero a tour à tour été journaliste, animateur d’ateliers d’écriture virtuels, vendeur de livres d’occasion, auteur de mots croisés et de scénarios de bande dessinée, photographe et parapsychologue.
Ángel Rama a classé ses écrits au sein du groupe des « bizarres », avec Armonía Somers, Felisberto Hernández et Marosa di Giorgio. Son travail ne peuvent pas être inclus dans un groupe ou un mouvement littéraire spécifique, bien qu'il comporte des éléments surréalistes.
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Je ne lis jamais un livre dont je dois écrire la critique ; on se laisse tellement influencer. (Oscar Wilde)
Arabella- Messages : 4827
Date d'inscription : 29/11/2016
Re: Mario Levrero
Le roman lumineux
Mario Levrero était un écrivain uruguayen, dont l'oeuvre qui semble abondante n'a été que très peu traduite en Français. Deux livres figurent au catalogue de l'excellente maison d'édition Noir sur Blanc, dont ce Roman lumineux, paru en 2005, un an après la mort de son auteur en langue d'origine, et en 2021 en France.
Le roman est composé de deux parties. La première, de loin la plus longue, raconte le quotidien d'un écrivain, qui semble être l'auteur lui-même. Il a reçu une bourse de la fondation Guggenheim, pour reprendre et terminer un roman dont il avait entrepris l'écriture quelques années auparavant et qu'il n'a pas pu mener à son terme. La deuxième partie du roman nous livre ce Roman lumineux, enfin le texte que l'auteur a réussi à écrire. Car malgré la bourse, il ne parviendra pas à bout de sa tâche, ajoutant juste un chapitre à l'ensemble déjà écrit.
La plus grande partie du livre raconte donc comment l'auteur s'y prend pour échouer, pour ne pas arriver à faire ce qu'il est censé faire, c'est à dire composer son oeuvre. le moins que l'on puisse dire, est que Mario Levrero ne donne pas un portrait flatteur de lui-même. Il semble vivre une véritable addiction à l'ordinateur, passant des heures qu'il tente de maîtriser en vain, à télécharger des contenus, écrire des programmes, jouer etc. Ses horaires sont décalés, il a donc du mal à gérer les aspects les plus basiques de sa vie comme faire des courses. Il a ses petits rituels, comme aller chez les bouquinistes pour se fournir en romans policiers, préparer lui-même ses yogourts. L'achat d'un climatiseur devient une véritable épopée, avec des épisodes, des rebondissements, des surprises. Ses seules activités sont en réalité des ateliers d'écriture qu'il donne, et les visites de ses amis, dont une femme qu'il a aimé et qui est en train de se détacher de lui. le quotidien d'une grande banalité, d'une grande insignifiance, où le sens paraît faire défaut.
Mais nous allons le retrouver, par opposition, dans le fameux Roman lumineux, dont l'auteur finit par nous donner le texte incomplet. Même si nous retrouvons le même personnage, juste un peu plus jeune, avec des goûts et habitudes par forcément à l'opposé de ce que nous avons lu précédemment, le projet de l'écriture est fondamentalement différent. L'auteur a l'ambition de saisir dans ce livre les expériences extraordinaires, indicibles, celles qui sans que l'on sache pourquoi traversent certains moments de l'existence, donnent un sentiment d'unité, de plénitude. Il s'agit de recherche, de traque en somme une forme de transcendance. Qui serait peut-être l'objet véritable de la littérature, de l'art plus généralement.
Mais Mario Levrero semble nous dire que c'est une activité vouée à l'échec. Il lui est impossible pour sa part de s'extraire de son quotidien, de ses routines, pour y arriver, et c'est le récit de cet échec qui occupe la plus grande partie du livre qu'il nous donne. Mais il laisse entendre d'une certaine manière que ce n'est pas grave, que l'essentiel consiste à essayer, à approcher ces moments de grâce qui permettent de supporter le reste, des vies insatisfaisantes, le sentiment de vacuité. Et qu'il est de toutes les façons impossible de dire ce qui ne peut être dit, juste senti pendant quelques instants, entrevu. le langage et la raison ont leurs limites et ne résument pas l'homme.
On pourrait trouver que 600 pages, dont la plus grande partie consiste à raconter un quotidien banal et répétitif c'est un peu long. Mais Mario Levrero a un grand sens de l'humour, une finesse dans les observations, et il nous donne un portrait de lui-même au final très sympathique, même si pas très flatteur. Et puis il arrive étrangement à donner de la profondeur à des événements de tous les jours, à créer presque du suspens en parlant des activités très insignifiantes, à établir une forme de complicité avec son lecteur, qui à certains moments ne peut que se reconnaître en lui.
C'est un livre assez étrange, mais très fascinant. Une vraie découverte pour moi.
Mario Levrero était un écrivain uruguayen, dont l'oeuvre qui semble abondante n'a été que très peu traduite en Français. Deux livres figurent au catalogue de l'excellente maison d'édition Noir sur Blanc, dont ce Roman lumineux, paru en 2005, un an après la mort de son auteur en langue d'origine, et en 2021 en France.
Le roman est composé de deux parties. La première, de loin la plus longue, raconte le quotidien d'un écrivain, qui semble être l'auteur lui-même. Il a reçu une bourse de la fondation Guggenheim, pour reprendre et terminer un roman dont il avait entrepris l'écriture quelques années auparavant et qu'il n'a pas pu mener à son terme. La deuxième partie du roman nous livre ce Roman lumineux, enfin le texte que l'auteur a réussi à écrire. Car malgré la bourse, il ne parviendra pas à bout de sa tâche, ajoutant juste un chapitre à l'ensemble déjà écrit.
La plus grande partie du livre raconte donc comment l'auteur s'y prend pour échouer, pour ne pas arriver à faire ce qu'il est censé faire, c'est à dire composer son oeuvre. le moins que l'on puisse dire, est que Mario Levrero ne donne pas un portrait flatteur de lui-même. Il semble vivre une véritable addiction à l'ordinateur, passant des heures qu'il tente de maîtriser en vain, à télécharger des contenus, écrire des programmes, jouer etc. Ses horaires sont décalés, il a donc du mal à gérer les aspects les plus basiques de sa vie comme faire des courses. Il a ses petits rituels, comme aller chez les bouquinistes pour se fournir en romans policiers, préparer lui-même ses yogourts. L'achat d'un climatiseur devient une véritable épopée, avec des épisodes, des rebondissements, des surprises. Ses seules activités sont en réalité des ateliers d'écriture qu'il donne, et les visites de ses amis, dont une femme qu'il a aimé et qui est en train de se détacher de lui. le quotidien d'une grande banalité, d'une grande insignifiance, où le sens paraît faire défaut.
Mais nous allons le retrouver, par opposition, dans le fameux Roman lumineux, dont l'auteur finit par nous donner le texte incomplet. Même si nous retrouvons le même personnage, juste un peu plus jeune, avec des goûts et habitudes par forcément à l'opposé de ce que nous avons lu précédemment, le projet de l'écriture est fondamentalement différent. L'auteur a l'ambition de saisir dans ce livre les expériences extraordinaires, indicibles, celles qui sans que l'on sache pourquoi traversent certains moments de l'existence, donnent un sentiment d'unité, de plénitude. Il s'agit de recherche, de traque en somme une forme de transcendance. Qui serait peut-être l'objet véritable de la littérature, de l'art plus généralement.
Mais Mario Levrero semble nous dire que c'est une activité vouée à l'échec. Il lui est impossible pour sa part de s'extraire de son quotidien, de ses routines, pour y arriver, et c'est le récit de cet échec qui occupe la plus grande partie du livre qu'il nous donne. Mais il laisse entendre d'une certaine manière que ce n'est pas grave, que l'essentiel consiste à essayer, à approcher ces moments de grâce qui permettent de supporter le reste, des vies insatisfaisantes, le sentiment de vacuité. Et qu'il est de toutes les façons impossible de dire ce qui ne peut être dit, juste senti pendant quelques instants, entrevu. le langage et la raison ont leurs limites et ne résument pas l'homme.
On pourrait trouver que 600 pages, dont la plus grande partie consiste à raconter un quotidien banal et répétitif c'est un peu long. Mais Mario Levrero a un grand sens de l'humour, une finesse dans les observations, et il nous donne un portrait de lui-même au final très sympathique, même si pas très flatteur. Et puis il arrive étrangement à donner de la profondeur à des événements de tous les jours, à créer presque du suspens en parlant des activités très insignifiantes, à établir une forme de complicité avec son lecteur, qui à certains moments ne peut que se reconnaître en lui.
C'est un livre assez étrange, mais très fascinant. Une vraie découverte pour moi.
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Je ne lis jamais un livre dont je dois écrire la critique ; on se laisse tellement influencer. (Oscar Wilde)
Arabella- Messages : 4827
Date d'inscription : 29/11/2016
Re: Mario Levrero
Quel étrange roman, en tout cas! En fait, j'ai retenu que la plus grosse partie du livre est consacré à son penchant pour "je ferai mieux demain" !
C'est drôle car mon cousin argentin m'en avait parlé justement, il l'avait trouvé complètement atypique mais fascinant aussi..
En fait, je ne sais pas s'il est pour moi, mais il intrigue, bien évidemment.
C'est drôle car mon cousin argentin m'en avait parlé justement, il l'avait trouvé complètement atypique mais fascinant aussi..
En fait, je ne sais pas s'il est pour moi, mais il intrigue, bien évidemment.
Aeriale- Messages : 11965
Date d'inscription : 30/11/2016
Re: Mario Levrero
C'est un livre difficile à conseiller. Mais je l'ai trouvé très plaisant à lire, beaucoup d'humour, d'auto-dérision. Au-delà d'un véritable contenu. Il parle de vrais sujets sans se prendre au sérieux.
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Arabella- Messages : 4827
Date d'inscription : 29/11/2016
Re: Mario Levrero
Ca pourrait me plaire, mais 450 pages quand même!
Tu l'as eu à la bibliothèque?
Tu l'as eu à la bibliothèque?
Aeriale- Messages : 11965
Date d'inscription : 30/11/2016
Re: Mario Levrero
Oui, je l'ai téléchargé sur la liseuse à partir du site de la bibliothèque. J'ai pris l'habitude pour les transports, c'est moins lourd et encombrant.
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Arabella- Messages : 4827
Date d'inscription : 29/11/2016
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