Patrick Modiano
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Re: Patrick Modiano
je te souhaite surtout de bonnes lectures 

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Re: Patrick Modiano
L’Herbe Des Nuits
Patrick Modiano
Il y avait bien longtemps que je n’avais pas fait une incursion dans l’univers de Modiano, sans doute parce que mes deux premières lectures avaient été décevantes et que j’avais l’impression d’avoir lu deux fois le même livre, sans doute n’étais-je pas prête pour la fameuse ‘petite musique’ de Modiano.
Mais pour l’Herbe Des Nuits, le charme a opéré, je me suis laissée porter par la balade dans Paris où la cartographie des rues conjure les souvenirs du narrateur. Ici un écrivain plus très jeune se lance à la recherche d’une mystérieuse Dannie dont il avait fait la connaissance alors qu’il avait vingt ans. Car comme il le dit :
« Oui, quelquefois la vie est monotone et quotidienne, comme aujourd’hui où j’écris ces pages pour trouver des lignes de fuite et m’échapper par les brèches du temps. »
Chaque lieu, chaque rue visitée à l’aide de notes prises à l’époques dans un petit carnet noir, fait remonter le souvenir de moments passés en sa compagnie et laisse toujours planer le flou de questions non posées par crainte de briser la relation, ou de réponses évasives de la part de la jeune femme. C’est ainsi que se poursuit la quête de souvenirs et parfois de révélations sur la vie et l’entourage douteux de Dannie dont on devine que l’écrivain avait été épris. Il convoque ainsi quelques fantômes dans une forme de strip-tease mémoriel, où une vérité jamais complète, jamais vraiment fiable apparaît par petit morceaux car la mémoire est capricieuse et les voies pour y pénétrer le sont encore plus.
Une quête un peu nostalgique du passé, que le temps et le recul permettent parfois d’éclairer, un flou mémoriel poétique nous portent au fil des pages. Un livre qui pourrait être lu à voix haute pour la résonance si particulière des mots. Cette fois, je me suis perdue avec Modiano dans un rêve éveillé le long des rues de Paris.
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'La littérature est une maladie textuellement transmissible, que l'on contracte en général pendant l'enfance'. Jane Yolen.
domreader- Messages : 3090
Date d'inscription : 02/12/2016
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Re: Patrick Modiano
Je n’ai pas lu celui-ci ni aucun de lui depuis longtemps mais il y a une époque, j’aimais bien sa « petite musique » ! Tu me donnes envie de le relire !
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"Quand je pense à tous les livres qu'il me reste à lire, j'ai la certitude d'être encore heureux" Jules Renard
Liseron- Messages : 3821
Date d'inscription : 02/01/2017
Localisation : Toulouse
Re: Patrick Modiano
Liseron a écrit:Je n’ai pas lu celui-ci ni aucun de lui depuis longtemps mais il y a une époque, j’aimais bien sa « petite musique » ! Tu me donnes envie de le relire !
Je te le passerai si tu veux.
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'La littérature est une maladie textuellement transmissible, que l'on contracte en général pendant l'enfance'. Jane Yolen.
domreader- Messages : 3090
Date d'inscription : 02/12/2016
Localisation : Ile de France
Re: Patrick Modiano
contente de lire que ta nouvelle rencontre avec Patrick Modiano s'est bien passée 

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Re: Patrick Modiano
Ah oui, volontiers !domreader a écrit:Liseron a écrit:Je n’ai pas lu celui-ci ni aucun de lui depuis longtemps mais il y a une époque, j’aimais bien sa « petite musique » ! Tu me donnes envie de le relire !
Je te le passerai si tu veux.
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Liseron- Messages : 3821
Date d'inscription : 02/01/2017
Localisation : Toulouse
Re: Patrick Modiano
Un pedigree
Un pedigree, paru en 2005, est le texte le plus ouvertement auto-biographique de Patrick Modiano, il se place d'une certaine manière au centre de son oeuvre, dans laquelle l'auteur livre à chaque fois, sous des formes différentes, des bribes de sa vie, réelle ou transformée par le travail de la mémoire.
Ici, le livre commence presque comme un compte rendu d'état civil, sur des faits, des dates, qui concerne ses parents, et même ses grand-parents. L'auteur indique « Je tente, à défaut d'autres repères de suivre l'ordre chronologique ». Puis il égrène, dresse des listes des personnes que ses parents ont pu connaître pendant l'Occupation, moment où ils se sont rencontrés à Paris. Période que Modiano évoque régulièrement dans ses livres, et qu'il n'a pas connue, puisqu'il est né en juillet 1945. Mais qui est un moment essentiel de sa mémoire, mémoire hantée par les disparitions, les destructions, les morts. L'Occupation c'est la mémoire pré-natale, qui précède le sujet, qui est d'autant plus fondatrice que la génération précédente, celle de ses parents s'est tu à ce sujet. Et qu'il faut donc tenter de reconstituer, de redonner vie, de sauver de l'oubli, de l'anéantissement. Ce qu'il essaie de faire.
Avant de passer à ses souvenirs à proprement parlé. Souvenirs d'une enfance triste, solitaire. Sa mère qui passe sa vie en tournées, et qui le laisse à droite et à gauche dans des endroits douteux. Son père pas vraiment là, qui le voit dans des lieux publics, qui en profite pour traiter des affaires avec d'étranges ou inquiétants individus. Des séjours dans des internats, qui ressemblent à des prisons, miteux pour certains. Deux événements essentiels : un film où il va avec son père lui révèle la Shoah, et la mort de son jeune frère qui a à peine une dizaine d'année, d'une leucémie.
Et aussi, comme la seule lumière, le seul possible de sortir de tout cela, mais aussi d'une certaine manière de donner sens, de supporter, la littérature. Les livres lus, très jeune, et dont il souvient, et qui l'accompagnent, malgré les interdits de certains internats, et puis aussi à un certain moment, l'écriture, comme la seule évidence.
Tout cela raconté dans un dépouillement extrême, sans aucun pathos, auto-apitoiement, ressentiment. Parce que ses parents ne sont que « Deux papillons égarés et inconscients au milieu d'une ville sans regard », victimes d'une époque, d'un contexte historique. Modiano essaie de comprendre, pas de juger, ni encore moins de condamner. Peut-être qu'il n'essaie même pas de comprendre vraiment, car ce n'est sans doute pas possible, mais il ressasse, il cherche, il fait ce travail de mémoire inlassablement. Sans illusions sur les bénéfices pour lui, cela n'effacera rien, ne permettra sans doute pas de surmonter, de passer à autre chose. Juste qu'il ne peut pas faire autrement que de transformer en littérature ce vécu, réel ou fantasmatique.
Une très grande littérature, bouleversante, alors que le ton, les mots sont si sobres, qu'ils semblent vouloir éviter l'émotion. Mais elle est là, authentique, vraie, parce que ce que Modiano raconte vient du plus profond de lui-même, du plus vital, et que son art de le mettre en mots est immense.
Un pedigree, paru en 2005, est le texte le plus ouvertement auto-biographique de Patrick Modiano, il se place d'une certaine manière au centre de son oeuvre, dans laquelle l'auteur livre à chaque fois, sous des formes différentes, des bribes de sa vie, réelle ou transformée par le travail de la mémoire.
Ici, le livre commence presque comme un compte rendu d'état civil, sur des faits, des dates, qui concerne ses parents, et même ses grand-parents. L'auteur indique « Je tente, à défaut d'autres repères de suivre l'ordre chronologique ». Puis il égrène, dresse des listes des personnes que ses parents ont pu connaître pendant l'Occupation, moment où ils se sont rencontrés à Paris. Période que Modiano évoque régulièrement dans ses livres, et qu'il n'a pas connue, puisqu'il est né en juillet 1945. Mais qui est un moment essentiel de sa mémoire, mémoire hantée par les disparitions, les destructions, les morts. L'Occupation c'est la mémoire pré-natale, qui précède le sujet, qui est d'autant plus fondatrice que la génération précédente, celle de ses parents s'est tu à ce sujet. Et qu'il faut donc tenter de reconstituer, de redonner vie, de sauver de l'oubli, de l'anéantissement. Ce qu'il essaie de faire.
Avant de passer à ses souvenirs à proprement parlé. Souvenirs d'une enfance triste, solitaire. Sa mère qui passe sa vie en tournées, et qui le laisse à droite et à gauche dans des endroits douteux. Son père pas vraiment là, qui le voit dans des lieux publics, qui en profite pour traiter des affaires avec d'étranges ou inquiétants individus. Des séjours dans des internats, qui ressemblent à des prisons, miteux pour certains. Deux événements essentiels : un film où il va avec son père lui révèle la Shoah, et la mort de son jeune frère qui a à peine une dizaine d'année, d'une leucémie.
Et aussi, comme la seule lumière, le seul possible de sortir de tout cela, mais aussi d'une certaine manière de donner sens, de supporter, la littérature. Les livres lus, très jeune, et dont il souvient, et qui l'accompagnent, malgré les interdits de certains internats, et puis aussi à un certain moment, l'écriture, comme la seule évidence.
Tout cela raconté dans un dépouillement extrême, sans aucun pathos, auto-apitoiement, ressentiment. Parce que ses parents ne sont que « Deux papillons égarés et inconscients au milieu d'une ville sans regard », victimes d'une époque, d'un contexte historique. Modiano essaie de comprendre, pas de juger, ni encore moins de condamner. Peut-être qu'il n'essaie même pas de comprendre vraiment, car ce n'est sans doute pas possible, mais il ressasse, il cherche, il fait ce travail de mémoire inlassablement. Sans illusions sur les bénéfices pour lui, cela n'effacera rien, ne permettra sans doute pas de surmonter, de passer à autre chose. Juste qu'il ne peut pas faire autrement que de transformer en littérature ce vécu, réel ou fantasmatique.
Une très grande littérature, bouleversante, alors que le ton, les mots sont si sobres, qu'ils semblent vouloir éviter l'émotion. Mais elle est là, authentique, vraie, parce que ce que Modiano raconte vient du plus profond de lui-même, du plus vital, et que son art de le mettre en mots est immense.
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Je ne lis jamais un livre dont je dois écrire la critique ; on se laisse tellement influencer. (Oscar Wilde)
Arabella- Messages : 4642
Date d'inscription : 29/11/2016
Re: Patrick Modiano
en voilà un commentaire qui me donne envie de relire 

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